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Anastassia Politi : « on m'a forcée à signer l'annulation du spectacle »

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Από iNFO-GRECE,

INFO-GRECE revient sur ce qui s'est passé à la première du spectacle "Pour Aphrodite, la dormeuse de Chypre" à Limassol, dont la deuxième représentation a dû être annulée déclenchant une vive polémique entre les autorités chypriotes, les médias de l'île et le metteur en scène parisien, la grecque Anastassia Politi. Mme Politis, pour qui le projet a été sabordé pour des raisons politiques, n'exclue pas un recours devant la Cour Européenne des droits de l'homme à Strasbourg pour défendre ses intérêts.

Anastassia Politis en tête de la Compagnie Erinna préparait depuis un an à Paris "Aphrodite, la dormeuse de Chypre" un spectacle basé sur les textes de poètes Grecs, Chypriotes et Français en l'honneur de Venus, la déesse émergée des vagues de l'île selon la mythologie. Le projet était assez ambitieux pour se présenter comme une production internationale avec des financements grecs, chypriotes et français et la participation de têtes d'affiche comme un décorateur espagnol internationalement connu, le chanteur-compositeur très populaire à Chypre Alkinoos Ioannidis qui devait interpréter certains passages sur scène ainsi que le comédien professionnel Kyriakos Tofaridis.

Le spectacle a été présenté en première officielle au théâtre Rialto à Lemessos dans le cadre du prestigieux festival Kypria, où la participation française d'Anastassia Politi tenait lieu d'événement, les Chypriotes impatients de rejoindre l'identité européenne dans le cadre de l'adhésion prochaine de l'île à l'Union Européenne, étant sensibles à toute présence européenne. Etait-ce cette attente qui a permis à l'ambitieuse metteur en scène de placer son spectacle et qui a entraîné les organisateurs de Kypria à surestimer la proposition de la compagnie Erinna et à la programmer une petite formation régionale jouant sur les marges du théâtre expérimental – fut-elle entourée de l'aura française et parisienne, toujours à bon cours à l'étranger- entre les formations de grand prestige comme l'Orchestre des Jeunes de l'Union Européenne interprétant la 9e symphonie de Beethoven, la Nouvelle Orchestre de Moscou jouant Verdi et Puccini et le Théâtre National de Grèce qui présentait Antigone de Sophocle ou encore l'Organisme Théâtral de Chypre avec les Phéniciennes d'Euripide. Dans le même programme, on trouvait l'Orchestre National de Chypre et l'Orchestre Populaire Mikis Théodorakis ! Les commentateurs locaux n'ont pas manqué de souligner l'incohérence de la programmation et le besoin d'un véritable directeur artistique du festival. Mais après la fête !

Si l'idée d'introduire une dose de théâtre expérimental et d'explorer les chantiers nouveaux du théâtre contemporain est louable, le résultat fut catastrophique aussi bien pour les organisateurs que pour les artistes. A l'issue de la première représentation, les critiques n'ont pas ménagé leurs commentaires, notamment les deux grands quotidiens de l'île Politis et Fileleftheros, qui ont demandé des explications aux responsables du ministère de l'Education et de la Culture : "La dormeuse de Chypre finit en tragédie, le comédien ivre a tenté d'enlever son pantalon sur scène", titrait Fileleftheros, "Fiasco" pour Politis et même "Le festival a été abusé" pour le Ministre chypriote de l'Education et de la Culture obligé de publier un communiqué.

Les nombreux problèmes rencontrés par la compagnie Erinna avant la présentation du spectacle ont fait que le public comme les officiels n'ont pas trouvé leur comte le soir de la première. Les uns attendaient de voir sur scène Alkinoos Ioannidis chantant et jouant du luth selon le programme qui avait été distribué, les autres estimant qu'il y avait un grand écart entre la proposition sur la foi de laquelle avaient été alloués les fonds et le résultat présenté.

Accusée d'amateurisme et d'impréparation, violemment attaquée par une presse qui avait pourtant annoncé un spectacle prometteur, l'Aphrodite dormeuse n'a pas pu jouir d'une deuxième soirée. Le festival a annoncé dès le lendemain matin que la deuxième représentation était annulée.

Après nos premières correspondances de Chyrpre, nous avons cherché à joindre Anastassia Politi à son retour à Paris, alors que la polémique enflait sur place amenant le Ministère chypriote de la Culture et de l'Education à publier un communiqué tenant pour seule responsable de l'échec Mme Politis, y compris pour l'annulation de la deuxième représentation. S'exprimant à la radio chypriote, le ministre M. Ioannidis a expliqué que "à la question si la deuxième représentation pouvait avoir lieu, Mme Politis a répondu négativement". Le communiqué du ministère diffusé quelques jours après faisait référence à une lettre adressée par Anastassia Politi le lendemain de la représentation où il était écrit que "la représentation a échappé de mon contrôle à cause du comportement irresponsable des comédiens Marc François qui s'est présenté ivre sur scène et Johanna Nisard qui a entrepris des initiatives sans rapport à mes instructions. Les deux comédiens en question ont détruit mes efforts pour présenter le spectacle dans un cadre respectable…".

"Faux !", répond aujourd'hui Anastassia Politi à iNFO-GRECE. "Ma fameuse recommandation d'annuler la deuxième représentation du spectacle, elle m'a été extorquée au terme d'une énorme pression psychologique de la part des cadres du Ministère chypriote de la Culture. Je ne reconnais pas la signature de ce document".

"Je me suis trouvée face à cinq personnes dans un bureau du ministère", explique Anastassia Politi. "J'étais dans un état de déprime après la première. Et, eux, ils me menacent de demander le remboursement de la subvention. Ils m'ont obligée de faire mon mea culpa et de demander des excuses dans une lettre dictée où je condamne moi-même la pièce et où je demande l'annulation de la deuxième représentation".

Concernant ce qui s'est passé sur scène, Anastassia Politi reconnaît qu'elle a cru, elle aussi, que le comédien Marc François était ivre, mais, dit-elle, "j'ai su après qu'il jouait le type ivre. Cela faisait partie de l'improvisation, la première partie devait être 'aristophanique' et la seconde plus dramatique, et il était si convaincant que j'ai cru aussi qu'il était ivre. Quant à Johanna Nisard qui s'est aspergée d'un sceau d'eau, j'étais effectivement en colère parce que j'ai glissé moi-même et j'ai eu très peur parce que je suis enceinte […] Mais, il ne faut pas oublier qu'il s'agit de théâtre expérimental basé en grande partie sur l'improvisation".

C'est cependant cette improvisation qui est mise en cause à Chypre. Pour les organisateurs, il s'agit d'un camouflage de l'impréparation du spectacle et des difficultés d'une équipe insuffisamment soudée. En effet, quelques jours avant le départ de la troupe pour Chypre, la majeure partie des comédiens ont abandonné le metteur en scène qui a dû embaucher de nouveaux comédiens à la dernière minute. Face à cette situation Mme Politis aurait dû, selon les organisateurs chypriotes, annuler ou reporter la présentation du spectacle.

"Le spectacle a été torpillé par un producteur indépendant pour des raisons personnelles et parce qu'il n'exprimait pas les positions du gouvernement actuel. Dans la pièce il y avait des allusions contre l'Eglise, contre le libéralisme, etc.", explique Anastassia Politi qui ne souhaite pas nous révéler l'identité de ce producteur. "C'est quelqu'un qui a d'importantes connexions à Chypre et dans la presse locale. Aucun des journalistes qui ont critiqué notre pièce n'était présent le soir de la première". Dans un communiqué envoyé à la presse chypriote, Mme Politis mettait également en cause le comédien chypriote Kyriakos Tofaridès qui "engagé aux côtés des acteurs français et séjourné pendant un mois à nos frais à Paris a voulu torpiller tous nos efforts. A cause de son comportement et de son alliance avec une jeune apprentie, mécontente de son costume, la première équipe d'acteurs a été dissoute. Devant le refus du ministère de m'accorder un report de la représentation, j'ai décidé de venir à Chypre avec une équipe renouvelée qui n'avait pas la préparation nécessaire…" Kyriakos Tofaridès a fait savoir de son côté, que l'ensemble de ses salaires et frais, transport compris, étaient pris en charge par l'Organisme Théâtral de Chypre et que lors de son séjour à Paris il était hébergé chez une comédienne qui "à [sa] connaissance n'avait eu aucune indemnisation pour l'eau et le chauffage [qu'il avait] consommé".

Quoi qu'il en soit, Anastassia Politi défend aujourd'hui son spectacle et son équipe : "j'avais prévenu qu'il s'agissait d'un work-in-progress et non d'une pièce achevée". Le malentendu sur Alkinoos Ioannidis concerne le ministère "qui était au courant que le chanteur ne serait pas sur scène" et la presse locale qui "n'avait qu'à se renseigner sur l'état d'avancement du spectacle avant d'annoncer la présence d'Alkinoos". Alkinoos aurait demandé une somme trop importante sur laquelle la Compagnie Erinna ne pouvait s'engager étant donné qu'elle n'a reçu ses subvenions qu'en août dernier. Pour elle, l'incident est desormais clos : "ce qu'ils disent à Chypre ne m'intéresse pas ; ce qui se dit à Paris m'intéresse davantage", nous dit-elle se désolant de l'incompréhension dont elle a été l'objet à Chypre. Pour Anastassia Politi il y a une "différence de mentalité. Eux [les chyprioes, ndlr], ils voulaient faire la mise en scène à ma place. Dans le théâtre contemporain 10 jours de répétition peuvent être suffisants, et la présentation de travaux en cours est courante dans les grands festivals en France".

Anastassia Politi appelle à témoin Thomas Hahn, critique et animateur des rubriques théâtre à Radio Libertaire, la radio locale de la Fédération anarchiste à Paris, invité à suivre le spectacle à Chypre, qui note que "la mise en scène de la dormeuse de Chypre étonne en éveillant le genre littéraire poétique au théâtre. Ici nulle trace de récitals solennellement poussiéreux ou des conférences spectacles didactiques, mais une vibrante recherche esthétique…" A iNFO-GRECE, nous avons cherché à suivre la suite du commentaire dans l'émission hebdomadaire de Thomas Hahn, mais en lieu et place d'une critique esthétique, cette fois, nous avons assisté à une analyse politico-économique sur Chypre "un petit pays où les pratiques démocratiques n'ont qu'une cinquantaine d'années", et ceci expliquant cela !

Moins emphatique et plus mesuré le témoignage de Stéphane Leca, directeur de l'Espace Culture Bernard Dague à Louvres, une commune de la banlieu parisienne, où est hébergé la Comagnie Erinna qui, ayant aussi assisté à la présentation de la pièce à Limassol, dans une lettre adressée à la directrice de la compagnie, il lui "assure son soutien et son intérêt pour le spectacle" ; l'incident chypriote ne mettant pas en cause l'accueil de la troupe dans ses locaux. "Certes les comédiens avaient encore leur texte en main, mais vous avez su parfaitement l'intégrer à la mise en scène. A aucun moment cela n'a entaché le remarquable travail sur l'image et sur la composition musicale", écrit-il.

Il n'empêche que la perspective de l'annulation de la subvention, ou du moins du solde, risque de mettre la compagnie Erinna en difficulté financière qui pourrait aller jusqu'au dépôt de bilan, selon sa directrice. Sur les 60.000 lyres chypriotes (environ 104.000 euros), il resterait 22.000 lyres à verser. Or, le montant est jugé extrêmement élevé à Chypre, et peut-être plus encore après avoir eu à juger la pièce ; le Ministère ayant fait connaître "avoir été abusé". Dans les milieux proches du Festival, on souligne d'autre part, que la subvention avait été accordée sur la base d'un montage financier incluant plusieurs partenaires qui manqueraient à l'appel.

En tout cas, Anastassia Politi qui nous a confirmé le maintien des représentations prévues cet automne à Paris se réserve le droit de "défendre [son nom] et la réputation de la compagnie Erinna et de demander justice à la Cour européenne de Strasbourg".

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