Ce devait être des joyeuses retrouvailles entre partisans du rapprochement greco-turc, et une célébration de la "coopération exemplaire" entre la Grèce et la Turquie ; ce fut un échange de reproches et d'injonctions réciproques à changer de "point de vue", peu courants en diplomatie.
La visite du premier ministre grec, Georges Papandréou, vendredi 7 janvier, à la session annuelle des ambassadeurs turcs, invité de son homologue turc Recep Tayyip Erdogan, a pris une tournure inattendue, après que, la veille, plusieurs appareils de l'armée turque cherchèrent à tester la résistance des Grecs en survolant, pour une nième fois, sans autorisation les îles grecques.
Ainsi M. Papandréou a posé d'emblée les présupposés de la coopération greco-turque, dont il a été toujours un fervent défenseur et "à laquelle aspire le peuple grec", a-t-il rappelé, citant en premier la fin des violations en Egée qui "donnent à la Grèce une impression totalement différente de l'impression d'une coopération pacifique que promeut le gouvernement du premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan". Des rappels qui ont laissé de marbre les quelque 200 ambassadeurs turcs qui formaient l'essentiel de l'assistance.
M. Papandréou s'est également référé au cas du "casus belli" qui, comme il l'a dûment signalé aux ambassadeurs turcs, "ne sied pas avec les principes du monde moderne" et "ne sied pas avec une Turquie qui souhaite avoir des problèmes zéro avec ses voisins". La Turquie ayant déclaré que l'extension des limites des eaux territoriales selon le droit internationale serait cause de guerre.
L'intérêt de la Turquie et l'intérêt de la Grèce dictent le rapprochement des deux pays, a expliqué M. Papandréou, exhortant les ambassadeurs turcs à persister dans leurs efforts en vue de l'intégration européenne de la Turquie.
M. Papandréou a fait également référence aux problèmes de l'immigration clandestine, dont il a discuté le matin même avec son homologue turc lors de leur entrevue en tête-à-tête, soulignant que la lutte contre ce fléau contemporain est obligatoire à la fois pour les deux pays.
Enfin, le premier ministre a fait allusion à la crise "conjoncturelle" que traverse aujourd'hui l'Europe, et s'est dit convaincu que l'Europe en sortira renforcée et sera alors en mesure de discuter plus favorablement de l'adhésion de la Turquie. Ceux qui aujourd'hui ont des réserves à l'adhésion de la Turquie, a-t-il ajouté, verront les choses différemment.
Le premier ministre, Georges Papandréou, s'est dit convaincu que la Grèce et la Turquie peuvent ensemble jouer un rôle majeur et être un exemple de coopération pacifique, énumérant des domaines comme l'énergie, l'alimentation, l'environnement, les problèmes de la pauvreté, l'inégalité et de l'alphabétisme.
Mais la confiance, a-t-il noté, se construit difficilement, citant à titre d'exemple le survol il y a deux jours de huit avions turcs de combat au-dessus de Agathonissi, "une petite île grecque de 150 habitants". "Quel est le sens de cette violation de la souveraineté grecque", a demandé M. Papandréou aux ambassadeurs turcs, insistant que "ces actions ne changeront pas le statut en Egée".
"Soyez en certains. Elles peuvent être devenues une routine pour la Turquie, mais ne croyez pas qu'elles sont devenues une routine pour la Grèce. Chaque action de ce genre est un rappel pour les Grecs que la Turquie n'a pas décidé de créer des relations différentes avec la Grèce", a renchéri M. Papandréou, appelant de ce fait M. Erdogan, "à titre d'interlocuteur crédible", "de consolider la confiance entre nous et finalement de construire une paix stable".
"Vous êtes des diplomates expérimentés, et vous savez bien que dans le monde actuel, la menace de guerre n'a pas de place, ni ne résout des problèmes. Et sûrement pas de la part d'une Turquie qui déclare souhaiter zéro problèmes avec ses voisins", a-t-il explicité.
Le premier ministre turque M. Erdogan est resté impassible aux injonctions de son homologue grec, et son "langage du passé", appelant M. Papandréou de changer d'approche.
"Nous ne pouvons pas construire notre avenir sur les difficultés passées ou le langage négatif du passé. Nous devons laisser cela derrière nous et pouvons travailler pour créer un nouveau langage pour construire notre avenir", a souligné le premier ministre turc.
"Peut-être devrions-nous changer notre approche", a précisé M. Erdogan, pour appeler "à passer d'une relation de voisinage à une relation de partenariat. C'est ainsi que nous devrions caractériser notre relation".
M. Papandréou a accepté la remarque de son homologue turc et déclaré que "nos objectifs visionnaires, qui nous donneront la force pour nous, les gouvernements de nos deux pays, mais aussi pour nos peuples, est pour nous de procéder sur une base différente vers la paix et la coopération qui sera au bénéfice de tous".
M. Erdogan a invité son interlocuteur "nous éviter d'utiliser une terminologie qui provoque des problèmes ente les deux pays, puisque notre but est de rapprocher nos peuples pour nous assurer un avenir meilleur en Méditerranée et en Egée, nous assurer une mer de paix".
Intervenant M. Papandréou a réfuté être lié au passé "au contraire, nous discutons des problèmes du passé avec beaucoup de sincérité, ce qui implique de plus grandes obligations", a-t-il soutenu, "d'aller de l'avant systématiquement, car nous savons qu'au fond nos deux peuples, de même aussi que leurs gouvernements, souhaitent une relation radicalement différente".
Selon le ministre grec, "la confiance que nous créons est basée justement sur la sincérité [qui existe] entre nous de régler les problèmes du passé", se référant à ce point aux bonnes relations personnelles entre les deux premiers ministres de Grèce et de Turquie.
Sur ce qui a été fait jusqu'à présent dans l'amélioration des relations gréco-turques, M. Erdogan a mentionné la constitution du Haut conseil de coopération de mai 2010, ainsi que la signature de 25 accords, les deux premiers ministres annonçant une nouvelle rencontre des membres du Conseil en juillet prochain.
La ND critique l'absence de préparation de la visite Papandréou en Turquie
La visite en Turquie du premier ministre, Georges Papandréou, suscite des interrogations et des inquiétudes, a déclaré le vice-président de la Nouvelle Démocratie (ND, opposition centre-droite), Dimitris Avramopoulos, qui souligne que le voyage a été entrepris sans aucune préparation diplomatique et sans agenda.
Ce que l'on peut retenir de tous les reportages, c'est que l'objectif principal de la diplomatie turque a réussi, à savoir de donner l'impression que les relations gréco-turques se sont améliorées considérablement, a souligné M. Avramopoulos qui demande au premier ministre d'informer le parlement des tenants de ce voyage. "Une diplomatie naïve fondée sur les seules relations publiques ne renforce pas notre place sur la scène internationale, bien au contraire elle la rétrograde et l'expose", a conclu M. Avramopoulos.
Sur l'aile gauche de l'opposition, aussi bien le KKE (parti communiste) que le Synaspismos (gauche radicale), reprochent à M. Papandréou une diplomatie secrète, orchestrée par l'OTAN et dénoncent les discussions secrètes concernant le plateau continental, le projet de co-exploitation de gisements de pétrole et de gaz naturel en Egée par des multinationales de Grèce, Turquie, des Etats-Unis et des pays de l'UE.
i-GR/ANA-MPA
mille fois bravo
Bravo à Papandréou de leur avoir dit en face
Deux peuples pas si différents
Au lieu de se regarder en chien de faïence continuellement, ces 2 pays pourraient à eux seuls créer une "Mini-superpuissance" dans cette région capitale. Mais ils en paraissent totalement incapable. C'est d'une tristesse à mourir.