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Chypre oppose un NON au cynisme de l'ONU

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Par iNFO-GRECE,

Les Chypriotes-grecs prenaient un grand risque en s'opposant au plan Annan pour la création d'un nouvel Etat bi-zonal sur base ethnique lors que référendum organisé samedi 24 avril par l'ONU. La force avec laquelle l'ONU, l'Union Européenne et les Etats-Unis ont mis les points sur les i pour convaincre les Grecs de Chypre à accepter ce plan, n'en rend leur vote que plus courageux. Si les Chyproturcs n'avaient rien à perdre et tout à gagner en votant OUI, les Greco-chypriotes ont préféré risquer les pressions immédiates pour préserver leur dignité et leur honneur en disant clairement NON.


Les Chypriotes-grecs ont préféré braver la pression internationale en s'opposant à plus de 75% au plan Annan qu'ils considéraient comme injuste à leur égard. Leur demander des concessions était une chose qu'ils étaient disposés à avaliser face aux eurodollars sonnants et trébuchants mis sur la table, leur demander d'avaliser 30 ans d'occupation militaire turque du nord de l'île et de se trouver d'égal à égal avec l'occupant était de trop.

Le cynisme d'une ONU - incapable de faire appliquer ses propres résolutions qui demandent le départ de l'armée turque et la fin de l'occupation - qui leur sert un plan d'après lequel l'actuel responsable de la division, le leader chyproturc Raouf Denktash se trouverait par le jeu de l'alternance à la présidence du nouvel Etat Président de la République de Chypre, a fini par convaincre les Chypriotes-grecs que ce plan était un mauvais plan.

Comme l'avait dit le Président Tassos Papadopoulos dans la semaine qui avait précédé le scrutin, "on m'a remis une République internationalement reconnue, je ne vais pas rendre une Communauté sans droit de parole sur la scène internationale et à la recherche d'un tuteur". Affaire d'honneur. Le même honneur que les Chypriotes ont voulu préserver pour garder la tête haute devant l'Histoire, plutôt que de la baisser honteusement devant les portes de l'Europe. D'aucuns deviennent des fous de dieu pour ces affaires d'honneur et avec lâcheté plongent l'humanité dans le chaos. Mais les Chypriotes sont nourris de culture hellénique et font de leur point d'honneur une leçon de courage à l'humanité. Comme les Grecs en 1821 face aux Ottomans, en 1940 face à Mussolini et en 41 à Hitler, en 67 face à la junte des colonels, en 1974 contre une tutelle monarchique étrangère à leur aspirations. Face à ces fiers NON grecs autant de OUI honteux turcs, chaque fois auprès de qui ils pouvaient monnayer aux mieux leurs plans expansionnistes dans la région (cherchez dans leur Histoire pour plus de précisions).

Hier, ces portes européennes tant convoitées par la Turquie ont motivé les Chyproturcs à voter majoritairement pour le plan Annan. Leur Etat autoproclamé, reconnu par la seule Turquie, n'a aucune chance d'accéder seul à l'Union Européenne. Economiquement ruiné, ne survivant que par la perfusion de "la mère" Turquie, l'état des exigences démocratiques de l'Union Européenne est à un niveau encore plus déplorable que celui de la Turquie. Dans ces conditions, un accord sur le plan Annan était pour les Chyproturcs, outre les avantages propres au plan Annan, un cadeau tombé du ciel. Ils n'auront rien négocié avec l'Union Européenne et les voilà membres du jour au lendemain grâce aux critères économiques et politiques remplis par la seule partie grecque de l'île ! De plus la majeure partie des aides européennes à Chypre irait dans la partie turque pour rattrapage du retard. De quoi faire plus d'un Turc heureux ! Le tout en préservant leur autonomie politique !

On se demande ce qui a bien pris leur leader Denktash, contrairement aux aspirations de sa communauté, pour s'opposer au plan Annan. Probablement qu'il ne se trouvait pas une tête à assurer la Présidence du nouvel Etat et sa représentation dans les Conseils des chefs d'Etat de l'Union Européenne, sans doute le risque de devoir rendre sa résidence, luxueuse demeure récupérée après l'exil de son propriétaire grec, mais beaucoup plus sérieusement la perspective de devoir rendre des comptes à la communauté internationale. Car, derrière son pseudo-Etat illégal, M. Denktash jouit d'une totale impunité. Sorti de l'ombre, en cas de réunification ou même de reconnaissance de son Etat par d'autres que la Turquie, M. Denktash s'exposerait à quelques demandes de comptes sur ses responsabilités. De la part des Chypriotes-grecs, mais aussi de la part de ses propres "sujets", les Chypriotes-turcs qui ont subi le joug de sa dictature pendant trente ans.

Quelle suite maintenant après le refus des Chypriotes grecs ? En rejettent le plan onusien, Chypre a anéanti 30 ans d'efforts pour la réunification. Trente ans de dialogue de sourds, de feutre diplomatique, de marchandages sournois et d'hypocrisie mutuelle. Tout cela ne pouvait accoucher mieux que le montage surréaliste qui a été servi ce samedi. 9.000 pages devant régir les moindres détails de la vie institutionnelle comme la vie quotidienne des habitants ! Le NON grec nous ramène alors 30 ans en arrière avec, pour seul cadre légal, les résolutions de l'ONU condamnant la Turquie, exigeant son retrait de Chypre et la restauration de la souveraineté de la République de Chypre sur l'ensemble du territoire de l'île. Il fallait commencer par cela. Il est encore temps de le faire. Le seul qui s'oppose à cette solution est la Turquie. Quelles sont les dettes que notre chère "communauté internationale" à envers la Turquie pour ne pas lui exiger l'application stricte et immédiate de ces résolutions ?

Déjà que Chypre n'est pas grande… quel intérêt à faire reconnaître, par un moyen ou par un autre, un pseudo-Etat turc au Nord de l'île grand comme une sous-préfecture comptant à peine 100.000 citoyens en âge de voter, 20% des votants de toute l'île ? Tout ça pour ça ! L'ONU veut la paix dans le monde ? Ce n'est sûrement pas en élevant tous les oligarques tribaux en chefs d'Etats internationaux ni, pire, en rabaissant les chefs des Etats en chefs communautaires qu'elle y arrivera. A moins qu'en multipliant les fronts, elle ne vise qu'à justifier et à renforcer sa propre raison d'être. C'est un danger que ceux qui étudient les macro-systèmes socio-techniques - et l'ONU en est un - ont pointé depuis longtemps ; plus vulgairement on appelle cela "diviser pour régner".

Notes complémentaires

Résultats des référendums sur l'accéptation du plan Annan
- Communauté grecque : NON 75,83% - OUI 24,17%
- Communauté turque : NON 35,09% - OUI 64,91%

 

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