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Lesbos : de la forêt pétrifiée à l'ombre des oliviers

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Soumis par iNFO-GRECE le
Excursion au Nord de la mer Egée

Forêt petrifiée de Lesbos

Qui ne connaît Lesbos, dont les nombreuses célébrités du monde antique ont porté la réputation aux quatre coins de la terre, et Mytilène, sa capitale ! Mais laissons un instant en paix Sappho et ses choristes Arion et Terpandros, tout comme le sage Pittaque ou nos plus contemporains, le grand peintre Théophilos et l'homme des lettres Tériade, mais nous n'éviterons pas la citation de l'autre enfant du pays, le grand poète Nobelisé Elytis ! La fertilité "culturelle" de l'île vaut un détour en soi. Délaissons aussi les magnifiques plages qu'entourent l'île, pour partir aujourd'hui à l'exploration d'autres chemins, l'un, insolite, menant à la "Forêt pétrifiée", et l'autre, plus ordinaire, mais combien méconnu alors que ses produits assurent la vitalité économique de l'île et dont la qualité recueille l'unanimité des spécialistes ; nous voulons parler des oliviers et de la fameuse huile de Mytilène.

Nous quittons le village de Molyvos et ses demeures en pierre construites en amphithéâtre au-dessus d'une magnifique plage, pour partir vers Sigri en longeant la côte ouest. Ici la nature a créé un paysage unique qui s'étend sur la majeure partie de l'ouest de l'île. Des troncs d'arbres "en pierre", d'autres debout, d'autres couchés, nous interpellent pour entrer dans une autre ère.

Troncs d'arbres fossilisés

Certains n'hésitent pas de l'appeler la Pompée des arbres. Car, il s'agit d'une forêt entièrement engloutie sous la lave des explosions volcaniques, il y a 20 millions d'années, et ainsi restée immortelle jusqu'à nos jours.

Un peu partout dans l'ouest de l'île, le visiteur peut rencontrer des restes de plantes ou d'arbustes pétrifiés, mais la plus grande concentration d'arbres fossilisées se trouve dans le lieu-dit Mpali Alonia, dans le Parc de la "Forêt Pétrifiée" et dans la région d'Antissa, déclaré Parc mondial. Ici plusieurs troncs s'élèvent jusqu'à 7 mètres de hauteur, le plus imposant ayant 20 mètres et un diamètre de 2,60 mètres.

Une grande partie de la forêt se prolonge jusqu'à la mer

C'est un botaniste autrichien, Francis Unger qui le premier a montré de l'intérêt pour cette curiosité, en 1844. En 1988, le français Louis Lausnay parle émerveillé de "la forêt pétrifiée de la patrie de Sapho". Un Musée de la Forêt pétrifiée a été créé en 1994 à Sigri, dans l'extrémité ouest de l'île, en vue de promouvoir son étude et sa connaissance.

Tronc d'arbre fossilisé il y a environ 20 millions d'années

La plupart des espèces appartiennent à des formes primitives des Séquoias, ainsi qu'aux ancêtres des peupliers, des lauriers, des platanes, des chênes, des palmiers et des cyprès. Le feu de la lave a protégé la structure du bois dont elle a magnifié les couleurs. Les experts concluent que dans la région, il y dominait un climat subtropical, proche du climat de l'Asie du sud-est ou encore de l'Amérique, qui se transformait rapidement en chaud continental.

Revenus au temps présent, avec toutes ces impressions de cendre ardent, et le soleil au zénith, la première chose à laquelle on pense est de se trouver un coin d'ombre.

Au milieu des oliviers de la baie de Gera

Il est difficile de traverser l'île sans remarquer les oliviers et le vert-argenté de leur feuillage. “Mes yeux étaient éblouis par les entailles infinies des vagues en pleine après-midi de juillet que, même si les oliveraies n'existaient pas en ce moment, pareille une cigale, je les aurai inventées”, écrit le poète Elytis, soulignant le repos et la fraîcheur qu'offre leur ombrage dans la canicule estivale.

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La récolte des olives vue par le peintre Théophilos (1938)

On estime ici à 11 millions le nombre des oliviers qui s'étalent sur 465 milles hectares. De quoi récolter dans les 100.000 tonnes d'olives et 20.000 tonnes d'huile, une des plus goûtées de Grèce. Malgré cela, peu de circuits touristiques s'arrêtent. Dans tous les dépliants, vous ne verrez que "la route qui traverse des immenses coteaux d'oliviers", mais elle ne s'arrête jamais. Ici l'industrie du tourisme et l'agro-industrie ne se rencontrent que dans les quelques investissements hôteliers des familles paysannes cherchant diversification dans le développement touristique de l'île.

Et ici encore, on sera en compagnie de l'éternité du temps grec. Levez les yeux sur le feuillage d'un vieil olivier, observez les loupes de son tronc, sa ceinture… certains traversent leur cinquième siècle, bien portants… On estime leur première apparition en Méditerranée il y a 5 à 6 millénaires.

Les Grecs anciens lui ont donné pour toujours ses lettres de noblesse, en en faisant leur assortiment nutritionnel privilégié et aussi, pour ce qui est de la nourriture spirituelle, le symbole de la Paix ; et, entre les deux, l'offrande préférée des dieux ; deux qualités, cultivées et retransmises sans rupture jusqu'aux Grecs modernes. Pas de salade sans filet d'huile d'olive, ni de plat qui ne soit cuisiné avec ce que, anciens ou modernes, nous considérons comme un cadeau de dieux : pas étonnant donc que l'huile sert à allumer les "candilia", ces lampes à huile qui entretiennent la flamme des orthodoxes devant les icônes de leurs saints. Quant à la Paix, la branche d'olivier qui couronnait jadis les champions olympiques, est désormais un symbole universel de la Trêve.

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Elytis encore:

“Et plus profond encore, derrière les vagues
sur l'Ile avec les baies des oliveraies
Un instant j'ai cru L'apercevoir
Celui qui a donné son sang pour que je m'incarne
Le chemin abrupt du Saint monter
une fois encore
Une fois encore
sur les eaux de Gera poser Ses doigts
et les cinq villages s'illuminer
Papados, Plakados, Palaiokypos
Skopelos et Mesagros
Force et héritage de ma lignée.”1

Car le grand poète grec, connaît bien la région2
. Les cinq villages cités forment la baie de Gera, d'où sa mère Maria Vrana était originaire, plus exactement du village de Mesagros. Son père, venait, lui, de l'autre bout de l'île, disons de l'autre côté de la baie, le village de Panagioudia.

La baie de de Gera

Pour se rendre à Gera, on prendra la sortie nord-ouest de la ville de Mytilène. A dix kilomètres de la capitale de l'île, on pourra faire un premier arrêt aux sources d'eau chaude, à Loutra. Dans le temps, les sources étaient à l'entrée du golfe. Aujourd'hui, il ne reste plus grande chose, à part les sources qui se trouvent dans la mer. Les amateurs des sources guérisseuses trouveront satisfaction quelques kilomètres plus loin à Therma au centre de la baie, un des plus importants biotopes grecs, avec des milliers d'espèces animales et végétales.

Des traversées de la baie sont proposées en caïque

Plus intéressante, sera la visite du port à Skala Loutron, où les barques des pêcheurs se mêlent aux quelques yachts de la jet-set venue faire escale.

Une autre raison de cette cohabitation est la réputation de la variété des moules et des huîtres de la baie. Longue de 7 milles et large de 2, elle forme un bassin idéal et unique en Grèce.

Depuis Therma, on longera la baie quelques kilomètres avant d'entreprendre la côte qui, une fois Palaiopyrgos et Plakados traversés, nous mènera vers Mesagros, aux pieds de Petrovouni, la montagne de pierre. Mais ici peu de pierre à découvert. Partout autour, des oliviers, à perte de vue ; mais quelle vue ! un des meilleures panoramas qu'on aie sur la baie.

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Le village de Perama

Mesagros est une petite commune de 1077 habitants qui s'occupent essentiellement d'agriculture ; pour l'animation il faut se rendre aux hameaux de Pyrgoi et d'Evriaki, au bord de la mer, où une partie du village, et notamment les jeunes, migre pendant les nuits de l'été.

Après Mesagros, on arrive à Skopelos. Avec environ 2000 habitants, il est le plus grand des villages de Gera. La curiosité ici ce sont les catacombes qu'on peut visiter sous l'église de Sainte Madeleine (Agia Magdalini) attribuées aux premiers chrétiens, et elles contribuent à l'éclat particulier du panégyri (fête du saint protecteur du village), qui a lieu le 23 juillet. Aussi bien dans le village que dans l'annexe côtier – comme pour les autres villages de Gyra – avec l'arrivée de l'été on se déplace vers la côte, entre Evriaki et Perama, distante de… 5 km !

Les villages de Skopelos et Papados entourés d'oliveraies. Au fond la baie de Gera

Notre dernière étape sera Papades. C'est un village relativement récent, développé à partir de 1838 quand un groupe de moines a bâti au milieu des oliviers l'église de Taxiarques et en même temps leurs cellules d'habitation. Le clocher de l'église est encore aujourd'hui la fierté du village. Avec ses 1500 habitants, il n'a pas moins de 4 stations d'essence, et l'infrastructure d'une ville avec hôtel, restaurants, banques et même un cinéma. Avec un peu de chance, vous vous trouverez au milieu des festivités d'un mariage à l'ancienne, qu'on célèbre ici une semaine durant.

Au bout du circuit, une baignade s'impose. En vous renseignant auprès des gens, vous découvrirez des plages qui vous surprendront par leur beauté, la variété et l'unicité de leur paysage. Et la taverne les-pieds-dans-l'eau, où l'on vous servira du poisson fraîchement pêché ne sera jamais loin. Gardez soigneusement l'adresse pour vous seuls, vous ne rendrez que service aux visiteurs qui vous suivront et éprouveront comme vous le plaisir de la découverte.

A. E.
Crédit photos : EOT, Municipalités de Mytilène et de Gera, Musée de la forêt pétrifiée de Lesbos
Juillet 2003

  • 1Traduction en français des vers cités du Axion Esti par Ath. E.
  • 2Voir étude de P. Pantazis "Elytis de Gera", publiée dans le bulletin local de Gera

L'huile, principale agro-industrie de l'île

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Paysage caractéristique de Lesbos avec demeure paysanne au milieu des oliveraies

A partir du 18e siècle, la culture de l'olive se développe à tel point qu'elle devient l'unique occupation des habitants, notamment dans la partie est et dans la partie centrale de l'île. Au début l'huile est extraite dans des moulins animés par les bras de l'homme ou la force des bêtes de somme, le plus souvent des chevaux.

Usine de savons à l'huile des Frères Tragaki, vers 1896 à Plomari

Malgré la taxation du 10e de la production par l'occupant Turc, présent sur l'île jusqu'en 1912, les meuniers formaient des prospères coopératives employant un nombre important d'ouvriers.

Le nombre des moulins va aller croissant même après l'arrivée des premières huileries à vapeur vers 1870. Les machines venaient de l'Angleterre, mais aussi d'une usine grecque sur la côte égéenne d'en face, à Smyrne. Les années suivant la 2e guerre mondiale seront des années de crise. Les quelques moulins qui avaient survecu jusqu'en 1970 vont se transformer en usines modernes centrifugées utilisant l'énergie électrique.

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Une grande partie de la forêt se prolonge jusqu'à la mer
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Tronc d'arbre fossilisé il y a environ 20 millions d'années
Exposition de troncs fossilisés au Musée de la forêt petrifiée de Lesbos
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La récolte des olives vue par le peintre Théophilos (1938)
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Le golfe de Gera
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Le village de Perama
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Skopelos et Papados entourés d'oliveraies
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Usine de savons à l'huile des Frères Tragaki, vers 1896 à Plomari