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Coup d'oeil sur la dernière insurrection des Grecs, de Mme Dufrénoy (1825) (2). Expéditions des Grecs.

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Soumis par efthymiouthomas le

[i] « Nous placerons nos guerriers entre la Macédoine et les Thermopyles ; nous combattrons sur les tombeaux de nos ancêtres qui moururent pour la liberté. Le sang des tyrans apaisera les mânes du Thébain Épaminondas, de l'Athénien Thrasybule, d'Harmodius et d'Aristogiton, qui secouèrent le joug de Pisistrate, de Timoléon qui rétablit la liberté et à Corinthe et à Syracuse, mais surtout de Miltiades, de Thémistocle, de Léonidas et des trois cents Spartiates. Les descendants efféminés des Asiatiques exigent bien moins d'efforts de notre part pour recouvrer notre indépendance.
« Amis, la patrie vous appelle ! Aux armes !
« Alexandre Ypsilanti. »

Les deux chefs se concertèrent ensemble et résolurent d'attaquer Constantinople ; le soulèvement général des Grecs devait s'opérer le 6 mars. Tous les Grecs opulents de cette ville avaient rassemblé dans leur maison des armes de différentes espèces ; un corps de troupe aurait surpris le poste de Topana, dépôt de toute l'artillerie de l'empire ; un autre, pénétrant dans l'intérieur du sérail, devait égorger le sultan et s'emparer du palais. Alors, de Topana les insurgés se seraient portés sur les vaisseaux qu'ils eussent surpris sans défense; le corps des topehis (artilleur) et celui des janissaires auraient été écrasés. Constantinople, livrée aux Grecs, assurait pour toujours le triomphe de leur cause sans une grande effusion de sang ; mais un traître se trouva parmi les conjurés ; le sultan, instruit de leur dessein, en prévint l'exécution, et de nombreux supplices signalèrent sa vengeance.

Ypsilanti dépêcha un courrier à Saint-Pétersbourg pour conjurer l'empereur de venir au secours d'un peuple qui professait la même religion que lui. L'empereur, qui venait de se prononcer contre l'insurrection de Naples, improuva, du moins publiquement, Ypsilanti ; le déclara démis de ses charges en Russie, rayé des contrôles militaires et privé même du droit de citoyen. Ypsilanti, placé entre le choix d'une mort honteuse ou d'une mort honorable, n'hésita pas : il continue à poursuivre sa dangereuse entreprise. La Porte forma à la hâte des baïracs (régiments) qui marchèrent sur la capitale ; une armée turque se dirigea sur la Moldavie, et des troupes furent envoyées par la mer à Galatz, et sur tous les points de la province qui bord de la mer Noire. Les deux partis eurent des succès et des revers. La garde d'élite d'Ypsilanti fit des prodiges de valeur ; mais les Grecs se virent enfin obligés de céder au nombre.

L'insurrection des îles porta la colère des Turcs au plus haut point d'exaspération. Ils poussaient de tous côtés des cris de rage ; les chefs de la conjuration contre Constantinople s'étaient d'avance ménagé des moyens de salut ; leurs agents seuls restèrent exposés à la fureur des musulmans. Pour en empêcher les excès, l'autorité ordonna aux chrétiens de se retirer dans leur maison avant six heures du soir ; mais la classe ouvrière ne pouvait obéir à cette loi sans mourir de faim. Le 19 avril, la population s'arme tout entière massacre les malheureux Grecs qu'elle rencontre dans les rues, viole les églises, enfonce les maisons des chrétiens, extermine leur famille, se répand sur les rives du port, tire sans distinction sur les navires qui y mouillaient, frappe un grand nombre de marins étrangers, et commet des atrocités épouvantables. Elle ne respecta que Galata et Péra.

Le mouvement sanguinaire du peuple de Constantinople eut lieu dans les villages environnants, avec des circonstances encore plus horribles. Les troupes destinées pour la mer Noire et pour Galatz, se signalèrent par le pillage et par le massacre. Elles ne respectèrent point les légations européennes ; on commit tous les forfaits ; aucun ne fut puni. Durant trois jours, la terreur ne cessa de s'accroître dans Constantinople et dans ses environs, et les malheureux chrétiens ne pouvaient en prévoir le terme.

[b][u][center]Expéditions des Grecs.[/center][/u][/b]

Aussitôt que la proclamation Ypsilanti avait été connue, toutes les provinces de la Grèce s'étaient déclarées en sa faveur ; la Morée, tant de fois victime de ses insurrections, courut soudain aux armes. Les montagnards du Taygète, chez lesquels se conservaient encore quelques germes d'indépendance, descendirent dans les plaines. Les Maniotes, demeurés libres au sein de contrées asservies, donnèrent l'impulsion à tout le reste de la province. Nobles descendants des fils de Lacédémone, ils restaient dignes de leurs aïeux, et sous l'abri de leurs rochers, défiaient les tyrans de la Grèce, dans l'espoir de les abattre un jour. Les temps sont arrivés, ils s'arment pour les vaincre.

L'insurrection du Péloponnèse amena le massacre des Turcs épars dans la province ; les Grecs croyaient venger ainsi leurs ancêtres, dont les restes privés de sépulture s'offraient de toutes parts à leurs yeux. Les musulmans, échappés au carnage, s'enfermèrent dans les châteaux fortifiés qui couronnent les rochers et les monticules de ce pays ; mais comme la plupart de ces forteresses se trouvaient dépourvues de munitions, les Grecs ne tardèrent pas à en occuper le plus grand nombre, et les Turcs, qui ne pouvait qu'atteindre difficilement les points que leurs milices tenaient encore, périrent presque tous de misère, ou sous les coups de l'ennemi.

Dans le commencement de l'insurrection, les montagnards seuls portaient des armes à feu, et le canon des forteresses occupées par les Turcs semblait devoir les écraser ; mais leur enthousiasme pour la liberté leur prêtait un courage invincible. Il sortit bientôt d'entre eux plusieurs chefs capables de commander et de vaincre ; une armée se forma ; le drapeau de la restauration fut arboré partout. L'Argolide, la Laconie, une partie de la Messénie se délivrèrent de leurs oppresseurs. L'Attique, dont le seul nom rappelle tant de grands souvenirs, ne tarda pas à s'insurger ; Athènes contraignit les garnisons turques à se réfugier dans la citadelle (l'Acropolis) ; un cordon de troupes en fit le blocus ; on composa un sénat, formé de vieillards et de respectables ecclésiastiques ; on régla le service autour de la citadelle et sur les côtés ; on expédia des détachements sur tous les points ; enfin les Grecs se rendirent maîtres de toute la campagne pendant qu'une de leurs armées occupait le passage des Thermopyles.

Toutes les îles de l'Archipel se déclarèrent pour la cause de l'indépendance. Hydra, célèbre par l'habileté de ses marins, Spezzia et Ipsara déployèrent un étendard national ; elles équipèrent tous les navires marchands qui se trouvaient dans leur port, et leurs flottilles, d'environ cent vingt voiles, et commandée par des chefs expérimentés, se mit en mer pour attendre les vaisseaux turcs et pour les combattre. Des navires expédiés à Trieste, à Livourne, à Marseille, en Hollande, allèrent y chercher des armes et des munitions de guerre, dans la crainte que les puissances de l'Europe une fois instruites de la révolution des Grecs, ne fermassent leurs ports au nouveau pavillon. (à suivre). [/i]

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