Les pays-membres de la zone euro se sont accordés dimanche sur un projet de prêt à la Grèce de l'ordre de 30 milliards € pour un an, ont annoncé dimanche le président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker et le commissaire compétent, Olli Rehn, ce qui devrait permettre à la Grèce d'emprunter cette semaine à des taux plus raisonnables.
Les pays de l'Eurozone avaient déjà tracé les grandes lignes d'un accord avec la Banque centrale européenne (BCE) et le Fonds monétaire international (FMI) pour un soutien à la Grèce "en cas de besoin" lors du sommet de l'Eurogroupe fin mars, et espéraient n'avoir pas besoin de dévoiler les détails du plan d'intervention. Une tactique qui n'a pas été du goût des marchés, alors que, de son côté, le gouvernement Papandréou, ayant perdu toute crédibilité, ne parvenait pas à rassurer sur une éventuelle banqueroute, malgré la répétition dramatique qu'il n'aurait pas besoin de l'aide européenne. Le fait était que, la semaine dernière, les taux d'intérêts battaient record sur record, atteignant des niveaux impossibles à soutenir pour l'économie grecque. Le surcoût des emprunts annulait tout le bénéfice des mesures d'austérité prises dernièrement sous la pression internationale pour réduire le déficit public.
C'est ainsi que les pays de la zone Euro ont décidé d'annoncer, dimanche, jour où les marchés sont fermés, les modalités du plan de soutien.
80 milliards d'euros, pourraient ainsi être mobilisés sur 3 ans, dont 40 milliards d'euros pour la seule première année, au taux proche des 5%, selon le type de prêt. Le FMI fournirait 10 milliards d'euros, tandis que les pays de la zone euro se partageraient l'effort pour les autres 30 milliards, dont 8,4 milliards incomberaient à l'Allemagne selon les premières estimations.
Ces montants ne seraient mobilisés qu'au cas où la Grèce en ferait la demande c'est-à-dire au cas où elle n'arriverait pas à emprunter sur les marchés.
Lundi matin, l'Euro remontait sensiblement face au dollar et les taux d'intérêt des emprunts grecs étaient revenus aux alentours de 5,90%, tandis que l'écart de la prime de risque par rapport aux emprunts équivalents allemands qui servent de référence se réduisait de 60 points.
Même si les milieux financiers restaient sceptiques sur l'usage que le gouvernement de Georges Papandréou fera du plan du soutien, l'annonce du dimanche devrait permettre les placement mardi de cette semaine de 1,5 milliards d'obligations grecques dans des conditions satisfaisantes.
De toute façon, Georges Papandréou semble dépassé par la situation, puisque c'est désormais la Commission qui fixe la feuille de route et les initiatives. Ainsi, le communiqué officiel publié après l'accord, précise que "la Commission, en liaison avec la BCE, va commencer à travailler dès le lundi 12 avril, avec le Fonds monétaire international et les autorités grecques sur un programme commun, en s'appuyant sur les recommandations adoptées par le Conseil Ecofin en Février. En parallèle, les membres de la zone euro États engageront les mesures nécessaires, au niveau national, afin d'être en mesure de fournir une aide rapide à la Grèce".
Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso a exprimé dimanche sa satisfaction au sujet de l'accord auquel ont abouti les pays membres de la zone euro en ce qui concerne les derniers détails de l'éventuelle aide coordonnée à l'égard de la Grèce.
M. Barroso souligne notamment que la décision prise aujourd'hui constitue un engagement clair et fort qui prouve que la zone euro met tout en oeuvre pour garantir la stabilité financière mais encore pour soutenir la Grèce selon les décisions des Sommets de l'UE en février et en mars.
Le premier ministre, Georges Papandréou, qui est arrivé dimanche en début de soirée à Nicosie pour une visite de travail, à son arrivée à l'aéroport de Larnaca, a salué la décision de l'Eurogroupe en y voyant le début d'une nouvelle politique européenne : "le 25 mars nous avons parlé d'une décision très importante et d'un filet européen de sécurité pour la Grèce. Aujourd'hui, la solidarité européenne s'est matérialisée et cette évolution ne concerne pas uniquement la Grèce mais c'est une décision très importante pour l'UE elle-même", a-t-il souligné.
S'adressant au peuple grec, M. Papandréou a affirmé "je veux que tous les Grecs soient certains que leurs efforts ne sont pas vains car nous oeuvrons inlassablement depuis le premier jour en ayant foi en la Grèce et pour faire face à la crise sans précédent pour n'importe quel gouvernement. Jour après jour, nous ouvrons la voie qui nous conduit sûrement vers la sortie de la crise et nous permettra de construire les perspectives pour la Grèce du développement durable, de la prospérité et de la justice sociale".
De même, le ministre des Finances, Georges Papaconstantinou, a salué l'accord comme "important et allant au-delà des espérances de la Grèce".
M. Papaconstantinou a encore déclaré que "le gouvernement n'a pas encore demandé l'activation de ce mécanisme qui constitue un filet de sécurité certain, car nous croyons que nous pourrons continuer d'emprunter sans problèmes sur les marchés".
Le ministre des Finances, qui en fin de semaine jurait encore que la Grèce ne demanderait pas l'activation du plan de soutien européen, n'exclue plus le recours. M. Papaconstantinou a défini les actions futures du gouvernement grec, indiquant notamment "nous verrons comment évolueront les marchés et les spreads au cours des prochains jours et semaines" afin de décider si la Grèce aura recours au mécanisme de soutien.
M. Papaconstantinou espère qu'il n'aura pas à demander des nouveaux sacrifices aux Grecs, indiquant que le FMI aurait assuré qu'il ne demandera pas une adaptation budgétaire supplémentaire pour 2010, alors qu'en ce qui concerne les réformes structurelles, "celles-ci sont précisées dans le programme de stabilité et de croissance tant pour cette année que les années suivantes", a-t-il dit.
Soulagement également à la Bourse d'Athènes qui a clôturé la journée sur un gain de 3,51%, avec les bancaires en tête qui ont progressé de 5,65%. Les autres places financières n'ont pas partagé l'euphorie athénienne et ont clôturé la journée du lundi à l'équilibre (CAC -0,00% ; DAX 0,02% ; FTSE 0,12% ; DJ 0,08% ; Nasdaq 0,16%).
Du côté de l'opposition, le président de la ND (Nea Dimokratia, conservateurs), Antonis Samaras, s'adressant dimanche à la réunion du comité central du parti a lancé une attaque virulente contre le gouvernement du PASOK : "la Grèce ne supporte pas d'autres mesures, ni l'économie, ni la société", a affirmé M. Samaras ajoutant "nous disons non à des mesures plus dures et nous nous opposons aux mesures qui créent le cercle vicieux de la récession".
"En octobre 2009, l'économie grecque se trouvait dans une crise de déficit et la même chose était également valable pour presque tous les autres pays d'Europe et plus particulièrement de la zone euro. La Grèce n'est pas une exception, elle ne peut être montrée du doigt", a encore dit M. Samaras tout en précisant que "le PASOK avec ses incroyables bévues, ses manoeuvres dilatoires, ses actions contradictoires a transformé la crise de déficit en crise d'emprunt, ce qui est beaucoup plus grave. Le PASOK a réussi en quelques mois à transformer la crise de déficit en une crise distincte et très lourde -uniquement pour la Grèce- en crise d'emprunt public".
Le principal parti de l'opposition refusera dans son ensemble le projet de loi fiscale qui doit être présenté mardi au Parlement. Néanmoins, le porte-parole de Nea Dimokratia reconnaissait lundi que le plan européen donne une respiration à l'économie grecque.
i-GR/ANA-MPA