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Crashs d'avion. Panique à bord ! La France rend publiques ses 'black listes'

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Par iNFO-GRECE,

Une véritable série noire pour le secteur aérien. La sortie de piste de l'Airbus d'Air France à Toronto le 2 août, heureusement qu'avec des blessés, était suivie par des accidents autrement plus meurtriers en Tunisie, au Venezuela et en Grèce... Avec le nouvel accident au Pérou, près de 300 personnes ont perdu la vie. La panique s'empare des voyageurs au moindre incident technique, les professionnels s'inquiètent et montent d'un cran le degré de vigilance. Des "listes noires" des compagnies douteuses sont annoncées. Sur les derniers événements, iNFO-GRECE a questionné le premier voyagiste français spécialiste de la Grèce.


Les voyageurs Français en révolte

Deux cent trente cinq passagers d'un avion de la compagnie charter tunisienne Cartago, à destination de Djerba en Tunisie, ont refusé mercredi soir de repartir dans le même avion après que celui-ci avait été contraint de revenir à l'aéroport d'Orly à la suite d'une alerte technique, a annoncé Aéroports de Paris (ADP). Plusieurs des passagers ont passé la nuit à l'aéroport, d'autres sont rentrés chez eux en attendant de pouvoir prendre un autre vol jeudi matin. L'avion était un A300 loué par Cartago à la compagnie turque Fly Air.

Lundi, c'était à Héraklion, en Crète, que cent cinquante-quatre passagers français, qui devaient s’envoler, pour Paris, à bord d’un MacDonnell-Douglas MD-82, ont refusé d’embarquer. L’appareil était affété par la compagnie grecque Alexandair. Le 11 août dernier, le même appareil avait dû effectuer un atterrissage d’urgence à l’aéroport de Milan-Malpensa, en Italie, à cause d’une panne de moteur. Les experts de l’aviation civile grecque lui avaient alors accordé un permis de vol jusqu’au 31 août, mais dimanche matin, date de départ initiale, l’avion était retardé une première fois, pour des "raisons techniques", puis de nouveau retardé lundi matin. Pour les passagers, il n'y avait rien de rassurant : compagnie jeune, arrivé sur le marché en janvier 2005 ; pilote de 21 ans et à peine 1000 heures de vol (nous n'avons pas encore pu vérifier s'il s'agissait bien du pilote ou seulement du co-pilote), l’appareil était identique à celui de la compagnie West Caribbean, qui s’est écrasé au Venezuela et fin du comble portait sur sa queue un logotype proche de celui d'Hélios écrasé au Nord d'Athènes ! Rationnel et irrationnel se conjugent en un cocktail amer dans l'esprit des voyageurs.

Mardi soir, un autre MC 82 d'Alexandair devait partir de Rennes avec 14 passagers en direction d'Héraklion avec une escale à Paris où il devait embarquer une centaine d’autres passagers. Contrôlé le 19 août, il n’a pas été autorisé à décoller après avoir été interdit de vol par l’aviation civile grecque. Les passagers ont finalement été répartis sur deux vols d’une autre compagnie grecque, Aegean Airlines.

Certes les Français sont particulièrement sensibles à la psychose qui suit généralement les accidents dramatiques, notamment lorsqu'il s'agit des compagnies étrangères qu'ils connaissent peu. Le souvenir de l’accident de Charm el-Cheikh le 3 janvier 2004 (148 morts) encore vivace, une centaine de passagers Français avait refusé d’embarquer mi-juillet à Hourgada en Egypte sur un McDonnell-Douglas d'AMC Airlines affrété par FRAM, suite à une difficulté au démarrage, bien que l'appareil avait été déclaré apte à voler.

Mais cette fois, la vigilance semble de mise dans les autorités aéroportuaires, soumise à une énorme pression médiatique et politique. Au moindre incident technique, elles n'hésitent pas à faire faire demi-tour aux appareils en vol, quand ce ne sont pas les pilotes, eux-mêmes, qui le demandent.

Les passagers d'un Boeing 737-300 de la compagnie Olympic Airlines en ont fait l'expérience de ce cran de vigilance supplémentaire, mercredi après-midi. L'avion avait décollé d'Athènes à 16h21 effectuant le vol 147 Athènes-Bruxelles. Peu après le décollage, le pilote a constaté un problème technique au niveau d'un des deux systèmes réglant le train d'atterrissage et en a averti immédiatement la tour de contrôle, demandant à revenir à l'aéroport d'Athènes. Toutes les mesures nécessaires de sécurité avaient été activées, des voitures de pompiers et des ambulances ayant été mis en état d'alerte. Les 124 passagers devaient embarquer à bord d'un autre avion de la compagnie pour repartir immédiatement sur Bruxelles.

840 victimes depuis le début de l'année. Les pouvoirs publics ne peuvent plus atteindre

Cinq catastrophes aériennes pour le seul mois d'août, et, surtout, des chiffres moins médiatiques comme ceux du Bureau d'archives des accidents aéronautiques de Genève selon lequel, depuis le 1er janvier, 120 accidents d'avions transportant au moins six passagers ont fait au total 840 victimes. Le Commissaire européen aux Transports, Jacques Barrot, a annoncé dès le lendemain du crash en Grèce, l'intention de la Commission de publier des listes noires des compagnies douteuses ayant été l'objet "de mesures d'interdiction" ou de "réduction de vol". Aujourd'hui la France confrontée, à son tour, à la charge dramatique de l'accident du Venezuela, lui a emboîté le pas. "Dès lundi, sur le site Internet de la Direction générale de l'aviation civile (DGAC), les Français auront à leur disposition la liste des compagnies interdites sur le territoire français, la liste des compagnies autorisées, la liste des compagnies affrétables de manière à ce qu'il y ait une totale transparence", a déclaré jeudi le ministre français des Transports, Dominique Perben. Parmi les autres mesures, M. Perben a annoncé l'obligation de communiquer le nom des compagnies d'aviation, les horaires de vol et les aéroports utilisées dans les vols charter, comme nous les demandions, ici à iNFO-GRECE, dans notre éditorial du 22 août.

Petit à petit la coopération européenne se met en place et devrait aller s'accélérant dans les prochains jours après un mois d'août qui restera dans les annales de l'aviation civile. Déjà en mai dernier, les DGAC allemandes et suisses avaient suspendu sans délai les autorisations de vol d'Onur Air, une compagnie turque, après que de problèmes de sécurité avaient été signalés par les autorités néerlandaises. La France suivait aussitôt. Au total, 50.000 voyageurs avaient été concernés en France, Allemagne, Suisse et Pays-Bas, selon le vice-président de la compagnie.

Toutefois, les vols charters, quoique plus populaires en raison des prix généralement pratiqués, ne sont pas la majorité des vols et, de plus, ne sont pas tous réalisés avec des compagnies low-cost, celles qui sont aujourd'hui montrées du doigt. Sur les 688.555 passagers de France métropole pour la Grèce en 2004, 620.156 l'étaient sur des vols réguliers, selon les chiffres de la DGAC française.

Le secteur touristique déjà en crise doit offrir des garanties supplémentaires

Il n'empêche que, lignes régulières ou charters, les professionnels craignent que la psychose qui s'est développée après cette série noire ne vienne aggraver la crise d'un secteur déjà durement touché depuis quelques années : attentats à New York, crise économique générale en Europe, hausse du prix des carburants…

Hélios, le propriétaire chypriote du Boeing qui s'est écrasé au nord d'Athènes supprime à compter de vendredi sa liaison fatale, Larnaca-Prague via Athènes, ont annoncé mardi 23 août à Prague les autorités aéroportuaires tchèques.

La conjoncture difficile a eu raison, en mai dernier, d'Hellas-Jet, autre compagnie chypriote, présente sur les lignes régulières de Paris, Bruxelles, Londres et Athènes, prenant de court plusieurs voyagistes qui y avaient réservé leurs places en nombre pour l'été.

Chez Héliades (aucun rapport avec Hélios à part la racine étymologique), un des principaux tours opérateurs français, spécialistes de la Grèce, que nous avons interrogé, on constate bien un tassement des réservations que l'on attribue "au fait que le caractère dramatique des derniers accidents a suscité une importante médiatisation". Toutefois, assure-t-on, ici, qu'il est prématuré d'annuler des vols. "Les mois de septembre et octobre sont des très bons mois. Nous avons un tassement des réservations mais pas d'annulations, donc, pour le moment, tous nos vols sont maintenus", nous déclare Xavier de Neuville, pdg d'Héliades. "Il est vrai que les gens nous questionnent davantage sur les compagnies, sur les qualifications des appareils et des pilotes", poursuit M. de Neuville.

Nous profitons pour lui demander son avis sur Viking, dont un des appareils a dû faire demi-tour mardi matin à l'aéroport d'Héraklio, Crète. "Nous travaillons avec quatre compagnies différentes : Viking, Aegean, Eurochypria et Blue Line. Ces compagnies ont notre confiance car elles sont soumises à des cahiers de charges précis et rigoureux. Viking a eu effectivement un problème en Crète. Nous n'y avions pas de passagers, mais nous avons demandé immédiatement des précisions. Il s'agirait d'un problème de surchauffe dans le générateur de la cuisine et bien que un deuxième générateur était à bord, ils ont préféré se poser pour faire les vérifications nécessaires. Viking est une compagnie suédoise et la Direction générale de l'aviation civile du Suède est connue pour sa prudence et ses contrôles draconiens. Aegean est une compagnie bien connue en Grèce où elle assure aussi nombre de lignes intérieures. Chez le chypriote Eurochypria, filiale de la compagnie régulière Chyprus Airline, toute sa flotte est neuve, ses A320 ont moins de 3 ans d'âge. Quant à Blue Line, il s'agit d'une compagnie française dont la maintenance est assurée par Air France", précise M. de Neuville

Interrogé sur le secret qui entoure les noms des transporteurs charter dans les agences de voyage, le président d'Héliades explique qu'il n'est pas toujours possible pour les tour opérateurs de communiquer tous les éléments de vol, dont beaucoup sont connus qu'au dernier moment. "Toutefois, pour Héliades", assure-t-il, "notre brochure 2005 indique à chaque fois le nom du transporteur, à l'exception seulement des départs de Mulhouse où les contrats n'étaient pas signés au moment de l'impression du catalogue".

- Est-ce qu'après les événements de cet été vous allez changer vos méthodes de travail avec les transporteurs ?

- Certainement que nous serons plus exigeants. L'entretien des appareils et les licences des pilotes sont déjà extrêmement réglementés par des instances internationales. Chaque avion a un carnet de bord de son entretien et de ses réparations. De plus, il a la garantie des assureurs. Un avion ne peut pas être assuré s'il n'a pas son carnet de bord à jour. Mais il est vrai que quelques assureurs son peu regardants. Après la série d'accidents de cet été, il y a une exigence supplémentaire des voyageurs quant à la sécurité des vols. En plus des vérifications d'usage, dans le renouvellement de nos contrats, nous allons vérifier systématiquement les cahiers de bord de l'entretien des appareils et demander les pièces justificatives pour avoir la garantie absolue que les contrôles prévus sont effectivement réalisés.

i-GR

Notes complémentaires

Additif du 31/08/2005:
Listes des transporteurs aériens autorisés ou interdits en France publiée par la Direction générale de l'aviation civile française

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