L'Assemblée générale de l'ONU a voté lundi à une majorité sans précédent et dans un climat solennel la résolution soumise par la Grèce pour la Trêve olympique. En présence du président du CIO, Jacques Rogge, par 190 voix sur un total de 191 membres (l'Irak, bien que membre de l'ONU, n'est pas représente à l'AG), les Nations unies ont approuve la résolution A/58/L9 qui prévoit l'interruption des hostilités du 13 au 29 août 2004, pendant toute la durée des JO d'Athènes, faisant revivre ainsi l'idée de la trêve de la Grèce antique.
S'adressant à l'Assemblée Générale, le ministre des Affaires étrangères, Georges Papandreou, et rapporteur de la résolution, a dit de la Trêve olympique qu'elle constitue le "traite de paix le plus long de l'histoire", invitant les membres de la communauté internationale "à adresser un message symbolique de paix et de coopération des peuples".
"La résurgence de la Trêve olympique offre une approche constructive de la question de la gestion des crises. Il s'agit d'un appel symbolique à briser le cycle de la violence pendant 16 jours pendant la durée des Jeux - et espérons-le aussi par la suite. Aujourd'hui, ce message ne pourrait être de plus d'actualité, étant donne le climat mondial d'incertitude. Le sentier de la paix doit passer par la compréhension mutuelle, le respect et la coopération entre les cultures et les religions. La Trêve olympique peut s'avérer un outil extrêmement précieux pour la diplomatie, en offrant une opportunité d'importance vitale pour le règlement pacifique des crises, à travers le dialogue et l'éducation", a dit M. Papandreou, pour conclure que "si nous pouvons avoir la paix pendant 16 jours, peut-être pourrons-nous avoir la paix aussi pour toujours".
Intervenant, entre autres, les représentants à l'ONU de Chypre, de la Chine, des Etats-Unis, d'Israël, de Cuba, de la Suisse et le prince Albert de Monaco, ont souligné à leur tour l'importance de l'initiative grecque en vue des JO d'Athènes en 2004, appelant aussi à sont application d'une Trêve olympique de nos jours
La résolution adoptée par l'Assemblée générale prie les Etats Membres d'observer, dans le cadre de la Charte des Nations Unies, la trêve olympique, tant individuellement que collectivement, pendant les Jeux de la XXVIIIe Olympiade, qui se tiendra à Athènes du 13 au 29 août 2004. L'Assemblée demande également à tous les Etats Membres de coopérer avec le Comité international olympique dans ses efforts visant à utiliser la trêve olympique comme un instrument pouvant promouvoir la paix, le dialogue et la réconciliation dans les zones de conflit pendant et après la période des Jeux olympiques. Elle demande enfin au Secrétaire général de promouvoir l'observation de la trêve olympique parmi les Etats Membres ainsi que l'appui apporté aux initiatives de développement humain grâce au sport, et de coopérer avec le Comité international olympique à la réalisation de ces objectifs.
Déclarations
M. GEORGE PAPANDREOU, Ministre des affaires étrangères de la Grèce, s'est félicité de la tenue des Jeux olympiques l'an prochain à Athènes, qui constitue l'occasion de restaurer l'ancienne tradition grecque de la Trêve olympique. Il a rappelé, à ce propos, qu'à l'origine, la promotion de la paix fut la raison pour laquelle les Jeux Olympiques avaient été créés, puisqu'ils marquaient la cessation de toutes les hostilités pour permettre aux milliers d'athlètes, de pèlerins et de spectateurs, de participer à cette célébration sacrée. Saluant les Nations Unies pour leur soutien à la coopération pacifique à travers le sport, il a rappelé que depuis 1993, l'Assemblée générale avait adopté à l'unanimité six résolutions soutenant cette cause. Le projet de résolution aujourd'hui présenté appelle, comme les précédents, tous les Etats Membres à observer la Trêve olympique, a ajouté le ministre, qui a déclaré par ailleurs que ce message ne pouvait être plus pertinent dans le climat récurrent d'insécurité mondiale. Même si elle reste limitée dans le temps, la Trêve olympique peut offrir une opportunité inestimable pour la réconciliation, a-t-il conclu.
Le Prince ALBERT DE MONACO, Prince héréditaire de la Principauté de Monaco, rappelant qu'il avait eu le privilège de participer à cinq reprises aux Jeux olympiques d'hiver, a estimé qu'à l'heure de la société de l'information, les Jeux olympiques constituaient une vitrine exposée en direct au monde entier. En effet, a-t-il ajouté, le souvenir des athlètes coréens défilant sous le seul drapeau de la péninsule coréenne lors des Jeux de Sydney, en l'an 2000, est porteur d'espoir pour tout un peuple et pour les défenseurs de la paix. Saluant ensuite l'Equipe de travail interinstitutions mise en place en 2002 par le Secrétaire général, le Prince Albert de Monaco s'est félicité du fait que son rapport souligne l'importance du sport en tant que droit humain et met en exergue le sport comme vecteur du développement et de la paix et comme élément indispensable à la réalisation des Objectifs de développement du Millénaire. Essentielle au développement de l'individu, la pratique du sport efface les barrières sociales et fait se rapprocher les êtres humains par-delà leurs langues et leurs cultures, a-t-il indiqué. Aussi, l'éducation physique doit-elle trouver sa juste place dans les systèmes éducatifs, a estimé le Prince Albert, ajoutant que la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant doit s'appliquer aux jeunes sportifs dont la fragilité physique et psychologique doit être dûment prise en considération. La Fondation internationale pour la Trêve olympique et le Centre international pour la Trêve olympique, récemment constitués, peuvent et doivent apporter leur contribution à la dissémination de ces valeurs, a-t-il dit, en particulier à l'heure où les conflits perdurent et où le monde est désorienté par le terrorisme. Il faut combattre les attitudes inadmissibles et contraires à l'esprit du sport, a poursuivi le Prince Albert, évoquant le racisme, la discrimination raciale la xénophobie et l'intolérance, ce, avant d'évoquer le fléau du dopage qui mine le sport. Rappelant que la Principauté de Monaco a signé le 10 septembre 2003 la Convention contre le dopage du Conseil de l'Europe et la Déclaration de Copenhague contre le dopage dans le sport dans laquelle les fédérations sportives de 80 gouvernements ont approuvé le Code mondial antidopage, le 5 mars 2003, il a souhaité que l'UNESCO soit en mesure d'adopter le projet de convention internationale contre le dopage avant les Jeux olympiques d'hiver de Turin en 2006.
M. JENÖ C. A. STAEHELIN (Suisse) s'est félicité des résultats de la Conférence organisée par son pays en février dernier, où la Déclaration de Macolin a été adoptée par 55 pays. Il a expliqué que celle-ci appelait les gouvernements, le système des Nations Unies, les fédérations sportives, les ONGS, l'industrie du sport, ainsi que les médias et le grand public à encourager le développement humain, social, politique et économique par le biais du sport. Il a encore estimé que cette Déclaration avait inspiré l'équipe de travail interinstitutions des Nations Unies, qui a présenté son rapport final au Secrétaire général en septembre dernier sous le titre: «Le sport au service du développement et de la paix: vers la réalisation des Objectifs du Millénaire». Le rapport fait ressortir notamment que la marginalisation de l'éducation physique est quasi universelle, selon une étude réalisée dans 126 pays, car elle est le plus souvent considérée comme non productive. Or, on estime qu'aux Etats-Unis 1 dollar consacré à l'activité physique fait économiser 3,20 dollars en frais médicaux, a rapporté le représentant, qui a aussi indiqué que le sport contribuait à éliminer les barrières sociales et pourrait devenir un instrument permettant d'appuyer la prévention des conflits. La Suisse a appuyé la résolution discutée aujourd'hui, qui vise à mieux intégrer le sport dans les programmes de développement, et à encourager l'ONU à développer des partenariats stratégiques en la matière.
M. ZHANG YISHAN (Chine) a souligné combien le sport était essentiel à la promotion de la paix et du développement, comme le montre l'esprit olympique qui est né il y a plus de 2000 ans. Les pays du monde doivent continuer à soutenir les principes de la Charte des Nations Unies et l'esprit olympique, a-t-il poursuivi, estimant que le sport enseignait la coopération avec les autres, apprenait l'échec et permettait de tisser des liens entre les peuples notamment. A cet égard, il a fait valoir que le Gouvernement et le peuple chinois faisaient tout leur possible pour se préparer à la tenue des Jeux olympiques à Beijing en 2008. Il a également souhaité un plein succès aux Jeux olympiques d'Athènes, qui retourneront ainsi à leur lieu d'origine l'année prochaine.
M. ARYE MEKEL (Israël) a apporté son soutien au projet de résolution soumis à l'adoption de l'Assemblée générale, rappelant que les Jeux olympiques constituent une occasion de paix et de réconciliation. Pressant les Etats Membres d'assurer la sécurité des Jeux, il a précisé que pour le peuple d'Israël les Jeux oLympiques ne peuvent être malheureusement séparés du souvenir de la tragédie qui avait endeuillé ceux de 1972 à Munich, lorsque des hommes armés du groupe terroriste septembre Noir avaient tué 11 athlètes et personnes de leur personnel. Il a regretté en conclusion que le Comité international olympique n'ait toujours pas trouvé une façon appropriée de commémorer cet événement.
M. ANDREAS D. MAVROYIANNIS (Chypre) a appuyé l'idée de la Trêve olympique, selon laquelle l'humanité peut créer un environnement libre de conflit au niveau universel, au moins pour un temps limité. Il a adressé ses remerciements au Premier Ministre grec, M. Papandreou, et au Président du Comité olympique international, M. Rogge, pour les efforts qu'ils ont déployés afin que ce projet prenne forme. Son gouvernement a soutenu la Trêve olympique, a-t-il expliqué, dans la mesure où celle-ci pourrait être le prélude à un monde libéré de la haine, des conflits armés et des agressions, comme l'a montré le projet de résolution préparé par la Grèce. Dans le même esprit, le représentant a accueilli favorablement le projet de résolution de la Tunisie, qui a établi un lien pertinent entre le sport, la paix et le développement. Il a particulièrement apprécié l'importance que celle-ci a accordé au rôle de l'éducation physique dans le bien-être des enfants, à la nécessité d'intensifier la lutte contre le dopage au niveau international, à l'utilisation du sport pour développer la santé publique, ainsi qu'à la construction d'une culture de la paix.
M. AHMED ABUL GHEIT (Egypte) a souligné combien, en ce moment, l'humanité avait besoin de conciliation et a estimé que le sport était essentiel à cet égard. A l'heure où le monde est divisé entre opposants, rongé par des conflits, où le fossé croit entre pauvres et riches, où les maladies déciment les pauvres qui n'ont personne pour les aider, le sport est particulièrement important car il fait disparaître toutes les barrières, unit les peuples et symbolise l'esprit de tolérance, a-t-il poursuivi. C'est donc la foi dans ces idéaux de paix et de justice portés par le sport qui a conduit l'Egypte à se porter coauteur des deux projets de résolution présentés aujourd'hui devant l'Assemblée, et qui consacrent tous les principes de paix inhérents au sport, a-t-il enfin déclaré.
Exprimant sa satisfaction devant le retour des Jeux olympiques à Athènes, M. BENJAMIN GILMAN (Etats-Unis) a affirmé que le but de l'olympisme était de mettre le sport au service du développement harmonieux de l'homme pour encourager l'établissement d'une société pacifique soucieuse de préserver la dignité humaine. Convaincu de ses bénéfices pour la jeunesse mondiale, il a ajouté que le sport pouvait aider la communauté internationale à rencontrer les objectifs de développement centré sur l'homme proposés par les conférences mondiales des Nations Unies. Il a salué ensuite le rôle du système des Nations Unies, en partenariat avec le Comité international olympique, dans la promotion du sport en faveur des personnes défavorisées, particulièrement les enfants. Pour sa part, le Sénat américain a approuvé une résolution soutenant la Trêve olympique dans l'esprit qui animait les créateurs de la Fondation internationale de la Trêve olympique, à Athènes. Dans ce contexte, le représentant a annoncé que grâce à la philanthropie américaine, une statue de bronze intitulée «Trêve olympique» sera érigée à Athènes, l'an prochain.
Déclaration du Président du Comité international olympique
M. JACQUES ROGGE, Président du Comité international olympique, a salué l'adoption de la résolution qui soutient la trêve olympique. Il a rappelé par exemple que l'observation de la Trêve avait permis aux athlètes de l'ex-Yougoslavie de participer aux Jeux olympiques de 1994. Dans les régions défavorisées, le Comité cherche à améliorer la qualité de vie des êtres humains en créant des projets sportifs pour les victimes de conflits en partenariat avec le HCR ou la Croix-Rouge internationale, ou encore œuvre avec les institutions du système des Nations Unies sur le terrain pour mettre en place des activités sportives récréatives. Le Comité international olympique coopère enfin avec le Programme des Nations Unies pour que les athlètes continuent la dissémination des messages de lutte contre le VIH/sida et la drogue.
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