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Sommet UE - Etats-Unis: l'exercice du grand écart

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Par iNFO-GRECE,

Le Premier ministre, Costas Simitis, et le Président américain, George Bush, ont mis l'accent sur la nécessité d'une coopération étroite entre l'Europe et les Etats-Unis afin de faire face efficacement aux "menaces communes", le Président en exercice de l'UE renchérissant sur "l'importance fondamentale" des relations transatlantiques et de l'interdépendante USA-UE. Des accords qui ne suffisent pas à masquer les profondes divergences d'appréciation de la situation internationale par les deux parties.


Dans des déclarations ponctuant le premier Sommet UE-USA après la guerre en Irak à Washington mercredi, M. Simitis s'est félicité de ses "entretiens constructifs qui ont permis de faire ressortir que tant les Etats-Unis que l'Europe soutiennent résolument la liberté, la démocratie et les droits de l'Homme", alors que M. Bush rappelait "le ferme soutien apporté par les Etats-Unis à l'Europe depuis la Deuxième Guerre mondiale et tout au long de l'après-guerre, pour encore mieux montrer que les deux parties de part et d'autre de l'Atlantique sont invitées à présent à coopérer pour faire face à la "menace commune" que constitue le terrorisme international".

C'est très exactement dans ce contexte que M. Bush a situé la signature des accords et les déclarations communes concernant la non-prolifération des armes de destruction massive, ainsi que des deux accords signés par les ministres de la Justice, MM. Petsalnicos et John Ashcroft sur l'assistance judiciaire mutuelle et l'extradition de criminels.

Mais, l'Europe n'a suivi M. Bush ni dans la qualification du Hamas palestinien en organisation terroriste, ni dans l'avertissement plus ferme à l'encontre des plans nucléaires iraniens.

"L'UE choisit la voie de la paix dans la question de l'Iran", a dit M. Simitis devant les journalistes grecs, peu après la conférence commune avec MM. Bush et Prodi à la Maison Blanche, citant son récent entretien téléphonique avec le président iranien, Mohammad Khatami, lequel l'a assuré souhaiter une transparence absolue dans la construction de la centrale nucléaire, le dossier qui a provoqué la vive réaction des Etats-Unis.

M. Simitis a expliqué que la philosophie qui régit l'approche américaine ne peut pas être adoptée par l'Europe, sans que cela ne signifie en aucun cas une impossibilité d'avoir une coopération étroite qui s'avérera être à l'avantage de tous. Toutefois, selon le Premier ministre grec, le président américain n'a aucunement fait allusion à l'usage de la force contre l'Iran lors de ses entretiens avec lui-même et avec le président de la Commission européenne, Romano Prodi.

"L'UE a tout intérêt à ce que soient appliquées les règles du droit international, et c'est pourquoi elle participe à la lutte contre le terrorisme", a dit M. Simitis qui a saisi l'occasion pour bien préciser que tout le monde doit respecter le droit international, citant à titre d'exemple... la Grèce laquelle a préconisé publiquement la procédure du recours à la Cour Internationale de la Justice de La Haye pour le règlement de son différent avec la Turquie portant sur la délimitation du plateau continental.

Quelques heures auparavant, lors de la conférence de presse commune, M. Bush avait insisté avec force sur la nécessité que le Hamas soit caractérisé et traité comme une "organisation terroriste", alors qu'à propos de l'Iran, il avait affirmé que le "monde libre" attend de Téhéran de se conformer aux exigences de la communauté internationale.

M. Simitis ne pouvait que rester sur les considérations générales soulignant la nécessité d'une coopération entre l'UE et les Etats-Unis au Proche-Orient et la promotion de la "feuille de route", et faisant remarquer que la signature des accords en matière de justice, est une première entre l'UE et un pays tiers.

Il ne restait en fait qu'à constater que malgré ces signatures les positions mutuelles ont peu bougé et que le soupçon s'installe quant à la mission de la future défense commune européenne, fragilisant ses relations avec l'OTAN. M. Simitis a reconnu que des différends séparent toujours les deux parties, et qu'elles "n'ont pas toujours les mêmes positions", mais, a-t-il expliqué, "l'amitié impose que les problèmes soient traités de manière disciplinée".

La déclaration du président de la Commission européenne, Romano Prodi, revenant sur déclaration connue du secrétaire américain à la Défense sur la "vieille et la jeune" Europe, pour avertir que les Etats-Unis sont trop "jeunes" pour régler tous les problèmes à eux tous seuls, ne devrait pas arranger le climat de réconciliation recherché.

"Les choses qui nous unissent sont bien plus nombreuses que celles qui nous séparent", a cherché à minimiser M. Simitis, donnant l'exemple de l'implication européenne en matière de sécurité et de défense avec le déploiement de forces de paix à l'ARYM (FYROM) et en Bosnie pour bien montrer qu'il serait erroné de percevoir une défense forte de l'Europe comme étant conflictuelle avec l'OTAN. "Cette défense européenne contribue à la promotion de la sécurité pour les Etats-Unis aussi, mais aussi pour tous les Etats tiers de la région", a-t-il ajoute.

Dans ce contexte, toute une série de questions commerciales, telles que les négociations sur les transports aériens qui devraient conduire à des vols plus nombreux et moins chers entre l'Amérique et l'Europe, mais aussi au sein même de l'espace européen, est passée quasiment inaperçue.

En Grèce, hostilité de l'opposition communiste

Comme attendu, le gouvernement grec s'est aussitôt félicité "de l'amélioration du climat de concertation instauré grâce au Sommet UE-USA mercredi à Washington et aux entretiens du Premier ministre et président en exercice de l'UE, Costas Simitis, et du Président de la Commission européenne, Romano Prodi, avec le Président américain, George Bush".

La rencontre, la veille, des dirigeants européens et américain témoignait d'un "meilleur climat de concertation", a affirmé jeudi le porte-parole du gouvernement, Christos Protopapas, se félicitant que "les tensions et frictions aient pu être surmontées".

A ce titre, M. Protopapas a cité l'accord de coopération judiciaire et les déclarations communes pour les transports aériens, l'énergie et la non-prolifération des armes de destruction massive.

Toutefois dans les rangs de l'opposition communiste mais alliée traditionnelle du Parti socialiste au gouvernement (PASOK), le KKE et le parti de Synaspismos (Cohalition), la désapprobation des positions européennes au Sommet UE-USA a été radicale.

Le SG du CC du KKE, Aleka Papariga, a exprimé son opposition totale aux accords signés à Washington, reprouvant la tactique du Premier ministre "de se dissimuler sous le masque de la présidence grecque et d'être fier que l'UE et les Etats-Unis ont une contribution commune à la barbarie du nouvel ordre". Mme Papariga a rejeté comme "extrêmement dangereux" à la fois l'accord d'assistance judiciaire UE-USA et la stratégie européenne (en matière de sécurité et de défense) présentée au Sommet de Thessalonique par le Haut représentant de l'UE, Javier Solana.

De son côté, le président de Synaspimos, Nicos Constandopoulos, a estimé que la rencontre des dirigeants de l'UE et des Etats-Unis marque la mise au pas de l'Europe aux dogmes impériaux et sa participation aux plans belliqueux américains. "M. Bush s'impose en empereur triomphant, l'UE sacrifie les valeurs démocratiques et sa culture institutionnelle pour l'apaiser, et le gouvernement, via M. Simitis, se transforme en gestionnaire docile des facilités qu'exige le nouvel ordre en dépit de l'opposition de tous les peuples d'Europe", a-t-il dit.

i-GR/ANA

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