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Nous les avons laissés seuls et la haine est en train de gagner...

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Par EFFY TSELIKAS,

Depuis quelques jours, des images insupportables nous arrivent de Grèce, de ses frontières maritimes ou terrestres, de Lesbos ou de Kastaniès. Celles de réfugiés, hommes, femmes, enfants demandant secours et celles de Grecs qui les rejettent. Face au dilemme insoluble que composent ces deux légitimités, celle du droit de demander asile à l'étranger face au danger et celle du droit de vivre en paix là où l'on est né sans être submergé et ni coulé économiquement, c'est un cri d'alarme que je lance pour alerter avant qu'il ne soit trop tard, au risque d'être traitée de Cassandre.

Car dans cette crise migratoire, on a oublié les Grecs. En 2015 pourtant, ils avaient accueilli près d'un million de réfugiés ; il avait même alors été question de leur donner le prix Nobel de la paix. Puis, plus rien. Et pendant cinq ans,ils ont continué à les accueillir, malgré l'accord-piège de 2016 entre l'Union européenne et la Turquie, où les îles sont devenues un pourrissoir pour tous ceux qui arrivaient, perdant espoir d'aller dans un autre pays pour une vie meilleure. Ces Grecs, souvent eux-mêmes descendants de déplacés venus de Turquie au siècle dernier, ayant entendu leurs parents et grands-parents raconter les mêmes affres de l'exil, les ont d'abord reçus avec philoxenia (hospitalité en grec, amour de l'étranger mot à mot). Mais la détérioration de la situation - rien que sur l'île de Lesbos plus de 20 000 réfugiés s'entassent dans des conditions innommables dans des camps surpeuplés officiellement prévus pour 6 000 personnes et où arrivent chaque jour de nouveaux arrivants-, l'abandon des gouvernements grecs successifs et le déni, voire l'obstruction de l'Union européenne et de nombreux pays membres, les ont amenés à se révolter.

Ainsi, lorsque le gouvernement conservateur arrivé au pouvoir en juillet dernier (qui avait cru régler le problème en supprimant le ministère des migrations, remis en place depuis) a imposé la construction de centres fermés partout dans le pays et en particulier dans ces îles d'accueil (Lesbos, Chios, Samos, Leros et Kos), la population a fait front pour refuser ce plan. A Lesbos, les insulaires, toutes sensibilités politiques confondues, se sont mobilisés dans une grève générale et ont bouté hors de l'île les forces de l'ordre gouvernementales. Mais quand le président turc Erdogan a déclenché son opération d'envoi massif de migrants aux frontières, les plombs ont sauté face à l'inanité des réponses des politiques, uniquement militaires et financières. L'Union européenne, après un show médiatique faisant atterrir ses dirigeants deus ex-machina d'un hélicoptère sur la frontière, signe un nouveau chèque pour prix de son impuissance mettant à mal ses valeurs proclamées et ferme les frontières à l'aide de son bras armé, FRONTEX. Le gouvernement grec, lui, bafoue le droit international en gelant la procédure d'asile, en légitimant le tir à balles réelles et le droit de repousser des réfugiés en mer et va construire des murs, barrière flottante en mer et clôture électrifiée sur la partie terrestre de la frontière turque.

« Rendez-nous nos îles, rendez-nous nos vies ! » La banderole accrochée sur la façade du théâtre municipal de Mytilène, capitale de Lesbos, exprimait encore la semaine passée le désarroi de cette population qui a vu sa vie bouleversée par l'afflux des migrants. La Grèce, pays sans aucun passif colonial et subissant depuis dix ans une profonde crise économique et sociale, a pris en pleine figure cette forme sauvage de la mondialisation. Qui a raconté le télescopage culturel et psychologique vécu par suite à cette migration brutale, le désarroi des quelques habitants de cette toute petite île accueillant des centaines de personnes dans leur minuscule église, l'affolement de ces pêcheurs passant leurs nuits à secourir les noyés en mer, la détresse de ces garde-côtes sauvant des centaines de fugitifs des embarcations retournées au risque de faire chavirer leurs propres bateaux ? Qui a ressenti le face à face de ces îliens avec la mort, celle d'enfants de l'âge de leurs propres enfants, entraînant une schizophrénie permanente entre un vécu de guerre cachée et un quotidien apparent de douceur de vivre ? Sans parler des conséquences sociales et financières : l'économie touristique en chute libre, la pêche en recul, l'agriculture entravée, les oliveraies dévastées, et pour horizon, leurs terres expropriées pour construire des centres-prisons et un avenir de garde-chiourmes de l'Europe ?

Les médias ? Certes, il y a eu beaucoup de reportages sur les réfugiés. Sur un tel sujet, c'est facile de faire de belles photos ou des témoignages émouvants. Mais aller plus loin ? Pas ou peu d'investigation sur les causes de cette situation, sur les responsabilités et surtout sur le nerf de la guerre de ce « migrant-business », devenu aussi rentable que la prostitution ou la drogue , l'argent direct ou indirect : l'argent des armes et des guerres, l'argent des réseaux de passeurs, l'argent des constructeurs des camps, l'argent des fournisseurs de l'aide humanitaire, l'argent pour militariser les mers et les frontières, l'argent versé à la Turquie pour faire taire sa menace, l'argent donné aux gouvernements grecs pour devenir les bons geôliers européens (argent d'ailleurs souvent détourné par la corruption).

La colère de la population désorientée se transforme à vitesse galopante en haine, qu'infuse le poison populiste, sciemment ravivé par des forces extrémistes ( hommes politiques désinhibés, milices auto-proclamées, néo-nazis, ultranationalistes religieux, ...) qui prospèrent sur la réalité sociale dégradée ; alors que la crise a fait partir hors du pays un demi-million de jeunes Grecs diplômés (sur une population de dix millions), voilà qu'une agence pour l'emploi des migrants veut faire travailler à un prix imbattable tous ces malheureux venus d'ailleurs. Ce sera bientôt la saison des tomates, des fraises, des concombres et... du dumping social.

L'hospitalité est devenue hostilité, la démocratie guerrière et l'Europe barbare. Réveillons-nous avant qu'il ne soit trop tard.

Effy Tselikas
journaliste franco-grecque

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Originaire de l'ile de Lemnos , je vais passer toutes mes vacances sur l'ile de Lesbos ; je suis dépité de voir que l'Europe laisse envahir l'ile sans réagir ; je connais le camp de Moria (magnifique petit village perché sur une colline) c'est devenu un désastre !! j'ai téléphoné à mes amis de Lesbos , ils n'en peuvent plus !!!! 100 millions de turcs contre 10 millions de grecs !!! merci l'Europe !

lundi je vais leur téléphoner pour leur dire KRISTOS ANESTI ;

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lun 13/04/2020 - 14:59 Permalien

L'union européenne n'est qu'une chimère inventée par les banquiers pour les banquiers.la Grèce ne les intéresse pas comme d'autres pays d'ailleurs.certains pays dont la France sont bien content que le Grèce se débrouille seule avec l'afflux massif des immigrés envoyé par la turquie.helas l'ile de Lesbos est devenue un dépotoir.cordialement Mario Mammos et bonne semaine sainte.

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lun 13/04/2020 - 19:04 Permalien

Bonsoir Mario Mammos , 

merci pour votre commentaire que je partage entièrement , je souhaite cependant échanger  également avec Madame Effy Tsélikas  comment pourrais je avoir son adresse mail ? 

Je vous remercie de votre réponse 

KALI VRAZIA  

Yorgos TSAROS

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lun 13/04/2020 - 19:31 Permalien