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Papandréou invite Erdogan à Athènes pour un bilan des relations gréco-turques

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Par iNFO-GRECE,

L'ambassadeur de Grèce à Ankara a transmis lundi la lettre de réponse du premier ministre grec, Georges Papandréou, à celle de son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan, dans laquelle il se déclare encouragé par leur désir commun d'améliorer les relations des deux pays, et donne une suite favorable au désir du premier ministre turc de visiter prochainement Athènes.

Près de deux mois et demi de réflexion ont été nécessaires à M. Papandréou pour répondre à M. Erdogan. Et pour cause, la lettre du premier ministre turc, envoyée un mois après la prise de fonctions de M. Papandréou à la présidence du gouvernement grec, était truffée d'embûches sémantiques.

La Turquie pressée par le temps

La partie turque espérait obtenir une visite à Athènes avant le Conseil européen du 10 décembre qui devait examiner les progrès de la Turquie dans sa marche pour l'adhésion à l'Union européenne. Cela lui aurait permis de donner des gages de bon voisinage avec un Papandréou se déclarant fervent militant de l'adhésion turque. Istanbul fut la première capitale européenne visitée par Papandréou après son arrivée au pouvoir, et Ankara espérait capitaliser dans la foulée avec une visite dans l'autre sens. C'était sans compter avec la tension qui désormais entoure l'anniversaire du décès d'un adolescent à Athènes en décembre 2008 lors d'un accrochage avec la police et qui avait dégénéré à l'époque à un mois d'émeutes et de troubles dans la capitale grecque. Ensuite la pression européenne pour le redressement des finances grecques est venue modifier les priorités dans l'agenda de M. Papandréou.

Entre temps, Athènes découvrait qu'il était question de "problèmes bilatéraux" alors que pour la Grèce le problèmes greco-turques relèvent du droit international, tandis que Nicosie rappelait que le Protocole d'Ankara (ouverture des ports et aéroports turques aux flottes de l'Union européenne), n'était toujours pas appliqué pour le avions et bateaux battant pavillon chypriote.

"Nous avons besoin d'une bonne préparation pour ne pas gaspiller l'occasion que nous avons devant nous à des fins de communication", se voyait obligé de déclarer le ministre suppléant des Affaires étrangères, Dimitris Droutsas.

Mais Ankara ne l'entendait pas de cette oreille et faisait monter la pression d'un cran en agissant en coulisses auprès de Londres et Washington pour qu'un calendrier soit fixé pour le règlement de la question chypriote, là où la Grèce et Chypre refusent de s'enfermer à nouveau dans un processus identique à celui qui avait conduisit à imposer aux Chypriotes le référendum Annan, du nom de l'ex-secrétaire général des Nations Unies.

Dans sa réponse, envoyée enfin lundi 25 janvier, après avoir mis l'accent sur les progrès réalisés dans de nombreux secteurs des relations bilatérales comme le commerce, les investissements, l'énergie, le tourisme, la diplomatie des citoyens ainsi que le climat psychologique et la communication des forces armées des deux pays, M. Papandréou insiste sur la nécessité -dix après- de faire un bilan de sorte à souligner les enjeux qui doivent être atteints pour réussir une relation plus viable et productive, une paix commune entre les deux pays.

Il indique notamment que "Grecs et Turcs, unis dans la coopération, peuvent devenir une force de stabilité et de coopération", ajoutant espérer que les deux pays peuvent devenir un modèle pour les autres régions de la planète, insistant sur le fait que la Grèce et la Turquie doivent régler les questions politiques fondamentales qui restent en suspens, tout particulièrement face aux grands défis mondiaux auxquels il faut faire face.

M. Papandréou procède à un bilan concret des problèmes qui continuent à porter atteinte aux relations entre les deux pays, tout en décrivant parallèlement le cadre dans lequel la Grèce recherche une solution.

Problème de la souveraineté en mer Egée

En ce qui concerne l'Egée, la priorité majeure de la Grèce est la mise en place d'un climat de sécurité et de confiance mutuelle, souligne M. Papandréou tout en insistant sur la nécessité de respecter l'intégrité territoriale, du droit international et des accords internationaux, tant au niveau bilatéral que multilatéral du fait que ces accords constituent le cadre pour le statut territorial en Egée et la base pour la garantie de relations de bon voisinage durables.

S'agissant de l'attitude de la Turquie en Egée, M. Papandréou souligne que les actions comme le casus belli, les survols et les activités de recherche sur le plateau continental qui n'a pas encore été défini selon les droits de la Mer en vigueur actuellement "ne contribuent en aucun cas à l'amélioration de nos relations", soulignant que les contacts exploratoires doivent reprendre et qu'il est nécessaire de leur donner un nouvel essor. A ce sujet, il précise que cette procédure ne peut avoir lieu sans la fixation d'une date d'expiration.

En cas de difficulté à trouver une solution acceptée mutuellement, dans un laps de temps qui doit être déterminé, M. Papandréou propose que la Grèce et la Turquie s'adressent toutes deux à la Cour internationale de La Haye, selon les règles afférentes du droit de la Mer. Il exprime à ce sujet la possibilité d'étudier des mesures qui pourraient contribuer à réduire la tension à la condition que celles-ci n'anticipent pas les positions politiques et juridique des parties tout en observant cependant que de telles mesures n'apportent pas une solution réelle car elle n'envisagent pas le problème à sa racine.

M. Papandréou souligne que le seul moyen de renforcer efficacement la sécurité en Egée est d'éviter les activités militaires qui entretiennent la tension.

La question chypriote

Passant au problème chypriote, M. Papandréou souligne que la clef pour une solution viable est de laisser les deux communautés décider librement de leur avenir commun, sans aucune intervention ou pression. Il évoque notamment un règlement basé sur une fédération disposant de structures qui garantiront le fonctionnement efficace de l'Etat, tout en ajoutant que la solution doit s'inscrire dans le cadre posé par les résolutions de l'ONU et aller de pair avec le cadre institutionnel, les valeurs et principes de l'UE et l'acquis communautaire.

L'avenir de l'île réunifiée est placé au sein de l'UE, ceci constituant une réalité qui ne peut être ignorée du fait que la République chypriote est membre à part entière de l'UE depuis 2004.

Patriarcat oecuménique de Constaninople

Après avoir exprimé le soutien de la Grèce à la perspective d'adhésion de la Turquie à l'UE, qui contribuera à la paix, la sécurité et la stabilité dans la région en établissant des relations de bon voisinage, M. Papandréou fait une mention toute spéciale au respect par la Turquie de ses engagement face à la minorité grecque et le Patriarcat oecuménique tout en exprimant la volonté de la Grèce d'aider la Turquie au niveau bilatéral pour le transfert de savoir faire et expérience sur les questions communautaires.

Minorité turque à Thrace

Répondant aux déclarations maintes fois exprimées par le premier ministre turc au sujet d'une minorité turque en Thrace, M. Papandréou souligne que le respect des droits de l'Homme de tous les citoyens grecs, indépendamment de leur religion, culture et provenance ethnique, est de la responsabilité exclusive de l'Etat grec et son engagement personnel face à chaque citoyen grec.

Il souligne encore que les droits de l'Homme ne peuvent faire l'objet de négociations ni ne peuvent être envisagés selon des conditions de réciprocité.

Immigration clandestine et coopération économique

Au chapitre de l'immigration clandestine, M. Papandréou insiste sur le fait que la coopération, tant au niveau bilatéral qu'européen, y compris le soutien de la Turquie aux opérations de la FRONTEX constitue le seul moyen pour faire face efficacement au problème. Il met par ailleurs en évidence l'importance de l'application entière du protocole greco-turc de réadmission (des clandestins), au-delà de la reprise des concertations pour la conclusion d'un accord afférent de la Turquie avec l'UE tout en faisant part de sa volonté d'élaborer un projet commun d'action pour faire face à l'immigration clandestine.

Après avoir évoqué d'autres aspects de la coopération bilatérale, telle que la coopération économique et commerciale et les visas pour les citoyens turcs, M. Papandréou qualifie de très importante la proposition de M. Erdogan pour la mise en place d'un Conseil de coopération de haut niveau. Il propose dans ce cadre l'organisation d'une visite officielle au niveau des premiers ministres et invite M. Erdogan à venir en Grèce, soulignant que les deux ministères des Affaires étrangères devront fixer une date probablement d'ici l'été.

Concluant sa lettre, M. Papandréou réaffirme le message de paix transmis en octobre à l'adresse du peuple turc et souligne qu'ensemble avec M. Erdogan ils peuvent modifier l'évolution des relations greco-turques et les conduire vers un avenir brillant dans l'intérêt des deux peuples.

i-GR/ANA-MPA

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