[i] [b][u]Grecs et Barbares[/u][/b]
C'est seulement à l'époque des guerres médiques, en présence d'un ennemi commun que les Grecs eurent conscience de l'unité de leur race et employèrent le mot de barbares par opposition à celui d'Hellènes. Lorsqu'ils donnèrent aux Perses, comme à tous les étrangers, ce nom de barbares, ils ne voulaient pas dire que ces peuples n'avaient ni industrie, ni culture intellectuelle, ni organisation politique.
Les Grecs savaient parfaitement que plusieurs peuples étrangers, les Égyptiens par exemple, étaient civilisés depuis bien plus longtemps qu'eux. Mais le titre de barbares impliquait à leurs yeux une conception différente et inférieure de l'ordre social, et ils exprimaient cette idée en disant que les barbares étaient des esclaves, et les Grecs des hommes libres. Les esclaves travaillent pour un maître, et la volonté du maître est pour eux la loi ; pour les hommes libres, la loi est un contrat mutuel ; ils la font eux-mêmes, et lorsqu'ils choisissent des magistrats pour la faire exécuter, ils peuvent toujours les révoquer.
Le roi de Perse avait des sujets qui lui payaient un tribut, ils recevaient ses ordres, transmis par un satrape : ces gens étaient donc des esclaves, et ce nom est constamment employé par les auteurs grecs comme synonyme de tributaires et de sujets. La cité grecque reposait au contraire sur le principe de la législation directe. C'est par là, et seulement par là, que les républiques de l'antiquité se distinguent à la fois des sociétés orientales et des sociétés modernes.
Le mot barbarie a chez nous un tout autre sens, qui n'a pas de véritable équivalent en grec. Nous ne pourrions sans injustice appliquer aux Perses l'épithète de barbares, car ils avaient une civilisation qui ressemblait, par bien des côtés, à la nôtre. [/i]