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L’écrivain, également scénariste pour la télévision, s’attelle aujourd’hui à son 15e roman, sur fond d’incident raciste. : Claude Stéfan
Noir. Son dernier livre, Les jardins de la mort, est sorti en version française fin mars. Une série de crimes sordides pour lesquels, comme à son habitude, il prend la capitale américaine pour toile de fond.
Washington, à la vie, à la mort. En 15 ans d'écriture et 14 polars, George Pelecanos n'a pas fini de s'inspirer de la diversité multiculturelle de la capitale américaine, de ses taux de crimes violents, de la pauvreté qui la propulsent au hit-parade des villes les moins avenantes des États-Unis.
Lui-même a choisi de donner une « vision authentique, documentée » de la mégalopole. À rebours de l'image de papier glacé version Maison Blanche - députés cravatés. Il compense ainsi un « certain manque en la matière dans la littérature américaine ». Une démarche qui lui vaut en France le surnom de « Zola de Washington ».
Dans ce nouveau roman, ce fils d'immigrés grecs, qui a grandi et vit toujours à Washington, a planté le décor dans l'herbe sombre des jardins communautaires ouvriers. C'est là que sont retrouvés, à vingt ans d'intervalle, les cadavres défigurés d'adolescents dont le prénom peut se lire aussi bien à l'envers qu'à l'endroit, comme « Asa ».
Méticuleuse obsession du détail, télescopage cinématographique de séquences qui valsent en quelques lignes d'une directrice de lycée de banlieue chic à un petit caïd qui meurt.
Malgré une densité de récit un peu suffocante au début, on se laisse happer par la confrontation entre les deux héros, un policier-père de famille scrupuleux et un ancien flic moins vertueux, reconverti en chauffeur.
Pour cette histoire, Pelecanos a puisé dans la réalité sordide de la plus longue série de meurtres - jamais élucidée - que Washington DC ait connue.
Comme pour son précédent roman, Drama City, à l'occasion duquel il avait côtoyé une brigade spécialisée dans les maltraitances canines, il s'est immiscé au coeur des forces de l'ordre, section « crimes violents ». « J'ai suivi toute l'enquête sur l'assassinat d'un assistant du maire, de la morgue jusqu'aux aveux du tueur. Mais ce n'est pas la procédure qui m'intéresse. Plutôt le quotidien des policiers. Voir que sur leur bureau, il y a des photos de leurs enfants, des icônes et des photos des victimes de meurtres non élucidés. Comme des mémos. »
Florence Le Méhauté.
Venant du site Ouest france
http://www.ouest-france.fr/George-Pelec…
Biographie de George Pelecanos
Né de parents d'origine grecque, George Pelecanos grandit dans les quartiers noirs et ouvriers de la capitale américaine, où son père, ancien Marine, tient un snack. A l'âge de 17 ans, il blesse accidentellement un ami au visage avec une arme à feu, et manque de le tuer. Cet épisode le marque irrémédiablement et il prend conscience de la facilité avec laquelle un destin peut glisser dans le tragique. Parallèlement, il suit de courtes études de cinéma à l'université du Maryland, mais préfère collectionner les petits boulots (il est successivement barman, plongeur, cuistot, ou vendeur de chaussures). C'est en dirigeant dès 1981 sa maison de production de films, Circle Films, qu'il se met à écrire la nuit. En 1990, il envoie son premier manuscrit 'A firing offense' à une seule maison d'édition dont il ne reçoit pas de réponse. Mais un an plus tard, son livre ressort de la pile des livres non-publiés et paraît finalement en 1992. L'auteur est alors lancé, et va écrire des romans les uns après les autres comme 'Le chien qui vendait des chaussures' en 1994. Pour écrire, il s'inspire de la face cachée de Washington qu'il a connu dans son enfance et nous décrit la vie de personnes cassées par la vie, loin de la réussite américaine. Dès 1996, il est aussi chroniqueur pour le Washington Post où il relate les faits de la rue car il 'reste en contact avec le côté plus chaud de la ville'. Aujourd' hui il vit à Silver Spring où il prépare son prochain opus.
Les anecdotes sur George Pelecanos
Un auteur reconnu
En 2001, son roman 'Un nommé Peter Karras' reçoit le Grand Prix du roman noir étranger du Festival du film de Cognac.
Sa maison de prod'
De 1981 à 1989, il dirige sa maison de production Circle Films à qui l'on doit les films des frères Coen. En 1989, il est le distributeur de John Woo aus Etats-Unis pour son film 'The killer'.
Au cinéma
Curtis Hanson, le réalisateur de 'L.A. Confidential', a adapté le roman 'Blanc comme neige' de George Pelecanos au cinéma en 2004.
http://www.evene.fr/celebre/biographie/…
L’âme de George Pelecanos
http://detailsmatter.wordpress.com/2008…
Toute sa bio et sa bibliographie
http://www.polarnoir.fr/auteur.php?aute…
un blog sur lui par un fan
http://blog.france3.fr/polarbonus/index…
Sur Wikipedia
http://fr.wikipedia.org/wiki/George_Pel…
Article sur lui
http://www.lire.fr/portrait.asp/idC=403…
Son site officiel mais en anglais
Au début, certains en ont même déduit que j’étais noir
«Au début, certains en ont même déduit que j’étais noir»
Rencontre. George Pelecanos assume son approche militante de l’écriture.
Recueilli par SABRINA CHAMPENOIS
QUOTIDIEN : jeudi 17 avril 2008
Belle voix de basse, sourire rare mais aménité indiscutable : autour d’un Jack Daniel’s, rencontre parisienne avec l’impeccable Pelecanos.
Les meurtres au palindrome des «Jardins de la mort» sont inspirés d’une histoire vraie.
Oui, une série d’assassinats commis au début des années 70, qui n’ont jamais été élucidés. J’ai fait des recherches, mais je n’ai pas voulu rencontrer les familles des victimes, ni les enquêteurs, pour que ça n’interfère pas avec la fiction. Et, là-dessus, j’ai eu le feu vert de la Brigade des crimes violents de la police de Washington : ça faisait des années que je souhaitais les voir au travail, ils ont accepté grâce à la série télévisée Sur écoute (1) à laquelle je collabore depuis quatre ans et qu’ils apprécient. Grâce à eux, j’ai pu suivre une affaire d’assassinat, du jour où le corps a été découvert jusqu’à celui des aveux du meurtrier. Le cas était assez sensible car la victime travaillait auprès du maire de Washington. Cette femme a été poignardée à mort par un voisin, qui était sous crack, et qui ne voulait au départ que lui soutirer un peu d’argent. Il avait la trentaine, n’avait jamais été arrêté auparavant, un des enquêteurs était allé au lycée avec lui. Mais le plus intéressant à observer, ça n’a pas été la procédure. Plutôt l’ambiance, les gens, ces flics. Voir, par exemple, leurs bureaux, où se télescopent les photos : le Christ, des cadavres, leurs enfants…
Le livre confronte un jeune Noir au rejet de l’homosexualité.
Une augmentation des suicides a été constatée chez les adolescents noirs : le rejet de l’homosexualité, qui est encore plus mal vue dans la culture noire que dans la blanche, y participe, tout comme l’obligation de réussite sociale qui s’exerce notamment dans les classes moyennes ou supérieures noires.
Il y a une histoire de clés, que des parents ne laissent pas à portée de leurs enfants.
Ça renvoie à une histoire qui m’est arrivée, à 17 ans : j’ai tiré par accident sur un ami. Ça lui a arraché une partie du visage. On s’amusait avec un revolver qui n’avait pas été mis sous clé, et à un moment donné, une balle est partie… A cette époque-là, la tolérance envers les armes à feu était encore plus grande qu’aujourd’hui.
Le crime, sous votre plume, n’est pas dramatisé, il se fond plutôt dans l’histoire.
Certains, autour de moi, qui vendent mes livres, voudraient qu’il le soit plus. Mais moi, je n’écris pas selon une méthode précise, je n’ai même pas de plan en tête quand je commence un roman. Je fais des recherches, et puis je me lance, c’est tout… Alors, si le meurtre arrive à la page 150, c’est comme ça, et ce n’est pas maintenant que je vais changer. Ce sont les personnages qui m’importent, avant l’action.
Vos livres ne sont pas si plombés que ça, d’ailleurs, même si le fond l’est.
Je n’aime pas le manichéisme, et puis j’ai besoin d’une lumière, d’espoir.
Le personnage principal de ce livre est un pragmatique, qui ne croit pas aux interprétations religieuses ; êtes-vous croyant ?
Je sais que les Etats-Unis passent parfois pour un pays d’évangélistes hystériques, mais je suis convaincu que la majorité des Américains prend les choses bien plus tranquillement. Moi, je vais à l’église grecque orthodoxe tous les dimanches en famille, et ça a moins à voir avec la religion qu’avec le sentiment de communauté : je me dis que, quoi qu’il arrive, je ne serai jamais vraiment seul, de même que mes propres enfants ne le seront pas une fois que moi et ma femme serons morts. C’est savoir qu’il y aura toujours une place où aller.
La série Sur écoute, à laquelle vous collaborez comme scénariste et producteur, se déroule à Baltimore : pas à Washington D.C., qui est la ville de vos romans.
Je ne connaissais pas Baltimore, mais, pour Sur écoute, j’y ai passé plusieurs mois. Et puis Baltimore est une ville très ouverte, où on a pu tourner entièrement en décors réels, au contact de la police et des habitants des quartiers. Une bonne partie des protagonistes vient de fait directement de là, certains sortaient de prison.
L’immersion, c’est aussi votre méthode, pour les romans ?
A cette différence près que, pour D.C., je connais depuis toujours et je passe des journées d’immersion, pas des mois comme à Baltimore. Je me suis d’ailleurs rendu compte que cette expérience à Baltimore a un impact sur mes livres, sur mes opinions mêmes. Prenez le trafic de drogue : jusque-là, j’avais tendance à me demander quand le gouvernement allait enfin passer à l’action. Maintenant, je me dis que le gouvernement ne fera jamais rien, vu que la population concernée est majoritairement pauvre, et ces gens-là n’ont aucun poids politique. Et puis la réponse doit venir en premier lieu des gens concernés : combattre efficacement le trafic de drogue, ça signifierait remodeler entièrement la ville, certains quartiers. La prison, enfermer les gamins, ça détruit les familles, et ils ressortent, replongent, c’est un cycle sans fin.
La solution ?
Proposer quelque chose de plus attrayant que la drogue, favoriser l’accès à l’éducation, à l’emploi. Dans la série, on montre que tous ceux qui mettent un pied dans la drogue finissent en prison ou morts. En même temps, l’attrait du pouvoir dépasse les considérations mercantiles : être le roi de la rue, ne serait-ce que cinq minutes, ça fait envie, quand il n’y a rien d’autre à espérer. Et quitte à en mourir.
Votre écriture est militante, dans son réalisme ; et vous ?
Avec les autres auteurs de Sur écoute, on a récemment lancé un appel à la désobéissance civile qui a été publié dans le magazine Time : sachant que, aux Etats-Unis, la voix d’un seul juré suffit à l’acquittement, nous nous engageons, dans le cas où nous serions appelés à être jurés dans un procès relatif à la drogue mais n’incluant pas de faits de violence, à nous prononcer systématiquement pour l’acquittement. Et peu importent les preuves ou la culpabilité de l’accusé. C’est une façon de protester contre la politique du gouvernement américain, qui remplit les prisons de petits délinquants, or c’est là s’attaquer aux citoyens qui sont déjà les plus faibles, les plus pauvres et les plus désespérés.
Vous évoquez la communauté noire alors que vous êtes blanc. Ça n’a jamais posé problème ?
Quand j’ai commencé à publier, certains en ont même déduit que j’étais noir… J’ai parfois été attaqué, mais je ne dirais pas par qui, pour ne pas leur accorder trop d’importance. De toute façon, dans mes romans comme dans la série, où je travaille aux côtés d’auteurs comme Richard Price, Dennis Lehane, Ed Burns, je sais exactement ce que je fais, et je le fais en mon âme et conscience.
Pouvez-vous juste dire si ces attaques émanent du côté blanc ou du côté noir ?
Noir.
Une certaine pudeur «à l’ancienne», un peu bourrue, est aussi à l’œuvre.
Oui, j’admire d’ailleurs des auteurs comme Steinbeck, Horace McCoy (On achève bien les chevaux), Edward Anderson (Tous des voleurs) : apparus après la Grande Dépression, ils ont écrit sur la vie quotidienne des gens, dont ils ont restitué la dignité. A ma manière, j’aimerais m’inscrire dans cette veine.
Votre avis sur Barack Obama ?
Je le soutiens à 100 %. Pas parce qu’il est noir, d’ailleurs : je lui fais confiance, je suis convaincu qu’il essaiera vraiment de concrétiser ses engagements. Sans compter qu’il est capable de tendre la main au camp d’en face. De toute façon, je ne pourrais jamais voter pour Hillary Clinton, qui a dit oui à la guerre en Irak : elle argue maintenant que c’était une erreur, mais, moi, j’ai été contre cette guerre dès le début, or elle est bien plus intelligente que moi. En réalité, elle a fait un calcul politique : comme beaucoup de démocrates, elle a cru à une guerre rapide, et elle a eu peur qu’on mette en doute son patriotisme.
Toujours est-il que si un Noir accédait à la Maison Blanche, ça changerait le cours de l’histoire américaine : pour les générations à venir, la question de la race du Président serait caduque. Et, ça, ce serait un immense progrès.
La série 24 Heures chrono envisage déjà cette hypothèse, et ça se passe mal…
J’ai regardé quelques épisodes, j’ai vite arrêté : 24 Heures, c’est de la propagande de droite, produite par la Fox, très à droite.
(1) Produite par HBO et plébiscitée par la critique, cette série met en scène une équipe de flics qui essaie de lutter contre le trafic de drogue. En France, la première saison a été diffusée sur Jimmy, les trois suivantes sont disponibles en DVD.
http://www.liberation.fr/culture/livre/…
The Wire le site francais
http://www.thewire-france.com/
The wire du site HBO
http://www.hbo.com/thewire/cast/crew/ge…
http://www.hbo.com/thewire/
Bonne lecture