La rédaction du MONDE
URGENT
le 22 avril 2004
Objet : Chypre - plan ANNAN - les raisons du NON
Mesdames et Messieurs de la rédaction du Monde
Je suis étonné de la façon dont LE MONDE traite le « non » (prévisible) de la population chypriote grecque au plan ANNAN pour la « réunification » de l’île.
A aucun moment vous ne mettez les lecteurs du MONDE en position de connaître le contenu de ce plan, ni les raisons profondes du « non » chypriote grec.
Ainsi la page que vous y consacrez dans l’édition du 23 avril ne comporte pas une seule fois le mot « réfugié ».
40% des Chypriotes grecs sont des réfugiés chassés du nord de Chypre par l’armée turque en 1974 et remplacés par des colons venus de Turquie. Avant 1974, les Grecs constituaient la majorité de la population du nord de l’île.
Comment comprendre ce « NON » sans prendre en compte ce traumatisme ?
Or le plan ANNAN prévoit l’octroi de la citoyenneté chypriote aux colons turcs, qui constituent la majorité de la population actuelle du nord de Chypre (les Chypriotes turcs, installés depuis le 16e siècle, sont estimés à seulement 95.000 personnes).
Le plan ANNAN donne la possibilité au futur état fédéré chypriote turc d’interdire l’installation des citoyens chypriotes grecs au nord de Chypre pendant 19 ans, s’ils dépassent un quota de 18% de la population dudit état. Et cela, en violation totale de la liberté d’installation dont jouira n’importe quel autre citoyen de l’Union européenne.
Le même plan prévoit encore la possibilité pour chaque état constituant de s’opposer, sans limitation de durée, au-delà de la période de 19 ans, à l’installation de citoyens parlant une langue différente de sa langue principale, ceci afin de « préserver l’identité dudit état ».
Le plan ANNAN prévoit également que les réfugiés chypriotes grecs chassés du nord en 1974 et 1975, ne pourront récupérer leurs propriétés situées sur le territoire du futur « état chypriote turc ». En remplacement, des indemnisations ridicules basées sur la valeur de ces biens à l’époque de la spoliation (c'est-à-dire en 1974-1975) sont prévues. Elles devront être payées, pour l’essentiel, c’est un comble, par Chypre elle-même et non par la Turquie.
En bref, le plan ANNAN prévoit le « gel ethnique » de l’île, afin d’empêcher les Chypriotes grecs de redevenir majoritaires au nord de Chypre. Il reprend ainsi l’idée turque de purification ethnique et de partage de l’île – TAKSIM - dont les premiers plans, dans les années 50, rêvaient d’une confédération sur base ethnique après déplacement des populations. C’est la raison pour laquelle le oui l’emporte au nord. Mais peut-on reprocher aux Chypriotes grecs de n’en pas vouloir ? Cela devrait réveiller la conscience des citoyens européens que nous sommes.
Enfin, le plan ANAN prévoit que Chypre devra nécessairement soutenir l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne.
Le plan ANNAN est en recul par rapport aux résolutions de l’ONU qui prévoyaient le retour des colons et le départ de l’armée turque. Il est en recul par rapport à la décision LOIZIDOU c/ TURQUIE de la Cour européenne des droits de l’homme, qui posait le principe du respect intégral du droit de propriété de réfugiés chypriotes et de la réparation de leur préjudice pour la privation de leurs biens pendant 30 ans.
Je n’aborde pas les aspects institutionnels et constitutionnels du plan, qui sont tout aussi choquant puisqu’ils octroient un véritable droit de veto à la minorité turque.
Je suis abasourdi qu’un journal de la qualité du monde puisse passer sous silence des tels « détails ».
Chypre entrera dans l’Union européenne, mais je ne vois aucun signe de solidarité entre les peuples européens le peuple chypriote, dont une partie du territoire est toujours, du point de vue du droit international, occupé par un pays tiers, la Turquie.
Je vous prie, sans trop d’illusion, de bien vouloir publier ma lettre. De bien vouloir, enfin, laisser une tribune de quelques lignes à un point de vue différent de celui majoritairement exprimé.
En réponse à Re: La pensée à la/ta turque par Jean-Francois
Re: La pensée à la/ta turque
Jean-Francois a écrit:
> je ne suis pas un expert... le fait est que les 2 cotes (à Chypre) ont eu des refugies.
puis,
> Je ne nie pas les faits, des centaines de milliers
> d Armeniens sont morts et je le deplore bien sur, mais
> apparemment des Turcs aussi sont morts par centaines de
> milliers, ... N est il pas concevable que le gouvernement Ottoman n y ait ete pour rien? Il y a des preuves des exactions, pour la responsabilite
> directe des Ottomans beaucoup moins sur...
>
Quelle question ? Un voleur et sa victime en viennent aux mains. Quand le gendarme arrive, il met tout le monde en prison disant "je ne sais pas qui dit vrai, le fait est que vous vous bagarriez !" - "Vous avez raison", dit le voleur au gendarme, "je n'en voulait qu'à son portefeuille et il m'a donné un poing sur la gueule; alors j'ai dû lui planter le couteau dans le ventre et me salir les mains de sang", se plaint-il. Le gendarme se tournant à la victime : - "Si tu l'avais laissé faire, nous n'en sérions pas la, crétin", et il fait sortir le voleur.
> Les parlementaires ne sont pas experts...ma logique s applique
> de la meme facon aux parlementaires turcs bien sur, dont ce n
> est pas le metiers et ne sont pas plus qualifies que leurs
> homologues francais...
>
Et donc, pas seulement tu persistes à nier l'Histoire, mais aussi le principe des décisions politiques d'une République démocratique (celle de la France, ton pays). Erudit que tu est, tu devrais savoir -sinon soupçonner- que les hommes politiques consultent les experts avant de prendre ce type de décisions.
> *****, encore une journée de gâchée ! Ce n'est pas encore
> aujourd'hui que je vais dormir tranquille et méditer sur la
> Raison de l'Homme.
>
>
> Et bien nous sommes deux mon cher philosophe...;)
J'aurais préféré meilleure compagnie ;)
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