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Absence de dogmes ; importance des rites, chez les anciens Grecs. Fustel de Coulanges, La cité antique; Schoemann, Antiquités grecques.

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[i] [b][u][center]Absence de dogmes ; importance des rites, chez les anciens Grecs.[/center][/u][/b]
Le mot « religion » ne signifiait pas chez les Grecs ce qu'il signifie pour nous ; sous ce mot, nous entendons un corps de dogmes, une doctrine sur Dieu, un symbole de foi sur les mystères qui sont en nous et autour de nous ; ce même mot, chez les anciens, signifiait rites, cérémonies, actes de culte extérieur. La doctrine était peu de choses : chacun était libre de se faire, sur les dieux, telle idée qu'il lui plaisait ; c'étaient les pratiques qui importaient ; c'étaient elles qui étaient obligatoires et impérieuses.

Le culte est né de la conscience qu'avaient les hommes de leur dépendance et de leur misère, et ses origines remontent à un temps où ils n'avaient pas un sentiment très élevé de la Divinité et de ses rapports avec la race humaine. Le culte est une sorte de contrat entre les dieux et les hommes : ceux-ci leur demandent assistance et, par gratitude ou par calcul, leur accordent certains honneurs. C'est donc un commerce d'échanges. L'homme remplit les obligations qui lui sont prescrites, et demande en revanche la satisfaction de ses besoins ; il donne pour obtenir et parce qu'il a obtenu sa piété n'est que l'accomplissement intéressé de la loi.

Mais le moyen de contenter les dieux ? Le moyen surtout d'être sûr qu'on les contentait et qu'on les avait pour soi ? On crut le trouver dans l'emploi de certaines formules. Telle prière, composée de tels mots, avait été suivie du succès qu'on avait demandé ; c'était sans doute qu'elle avait été entendue du dieu, qu'elle avait eu de l'action sur lui, puisqu'il n'avait pas pu lui résister. On conservera donc les termes mystérieux et sacrés de cette prière. C'était une arme que l'homme employait contre l'inconstance de ses dieux. Mais il n'y fallait changer ni un mot, ni une syllabe, ni surtout le rythme suivant lequel elle devait être chantée. Car alors la prière eut perdu sa force, et les dieux fussent restés libres.

La formule n'était pas assez ; il y avait encore des actes extérieurs dont le détail était minutieux et immuable. Les moindres gestes du sacrificateur et les moindres parties de son costume étaient réglés. En s'adressant à un dieu, il fallait avoir la tête voilée ; à un autre, la tête découverte ; dans certains actes, il fallait avoir les pieds nus. La nature de la victime, la couleur de son poil, la manière de l'égorger, la forme du couteau, l'espèce de bois qu'on devait employer pour faire rôtir les chairs, tout cela était réglé pour chaque dieu par la religion. En vain le cœur le plus fervent offraient-ils aux dieux les plus grasses victimes ; si l'un des innombrables rites du sacrifice était négligé, le sacrifice était nul. Le moindre manquement faisait d'un acte sacré un acte impie. L'altération la plus légère troublait et bouleversait la religion de la patrie, et transformait les dieux protecteurs en autant ennemis cruels. C'est pour cela qu'Athènes était sévère pour le prêtre qui changeait quelque chose aux anciens rites.

Toutes ces formules et ces pratiques avaient été léguées par les ancêtres, qui en avaient éprouvé l'efficacité. Il n'y avait pas à innover : la suprême piété consistait à faire comme eux. Il importait peu que la croyance changeât ; elle pouvait se modifier à travers les âges et prendre mille formes diverses, au gré de la réflexion des sages ou de l'imagination populaire. Mais il était de la plus grande importance que les formules ne tombassent pas en oubli et que les rites ne fussent pas modifiés. [/i]

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