La volonté résolue du gouvernement de poursuivre sur la voie des réformes et la matérialisation des engagements préélectoraux de Nea Dimokratia (ND) il y a deux ans et demi ont été les principaux points de l'allocution du Premier ministre, Costas Caramanlis, samedi soir dans le cadre de la 71e Foire internationale de Thessalonique (FIT), marquant traditionnellement la rentrée sociale et économique en Grèce à quelques semaines des élections municipales. Dans sa rencontre avec la presse, M. Caramanlis a exclu des élections nationales anticipées. Sans surprise, l’opposition a donné la réplique au premier ministre, les centrales syndicales ayant réussi à mobiliser plusieurs milliers de sympathisants lors de leur manifestation le même jour devant la FIT.
Devant les représentants des classes productives et de la classe politique, M. Caramanlis a prévenu "qu'il n'y aurait pas de prestations inconsidérées ne pouvant être soutenues par l'économie. Ce cercle vicieux des prestations préélectorales, qui déstabilise l'économie, et qui après les élections conduisent à des mesures encore plus sévères, doit cesser. Le pays ne peut l'endurer. La relation de confiance avec les citoyens soutient notre politique responsable, et non des prestations irresponsables".
Citant notamment la réforme fiscale pour les entreprises, et dans un second stade, engagée actuellement, celle pour les personnes physiques, et insistant sur la réforme dans l'éducation, le premier ministre a caractérisé les réformes comme une politique de progrès, soulignant que "dans un monde qui change à de tels rythmes, il ne suffit pas seulement d'affronter les problèmes. Le progrès signifie avoir l'audace de faire des réformes exigées par la conjoncture internationale, de changer plus rapidement, d'aller de l'avant, d'être prêts, forts et unis".
Le premier ministre, à ce point, n'a pas manqué de mentionner en outre les réformes en cours dans les Entreprises d'utilité publique (DEKO), les privatisations, la mise en valeur des biens publics et les Biens immobiliers touristiques (ETA), l'entrée en Bourse de l'Entreprise publique de pétrole et gaz naturel (DEPA), la participation de l'Etat dans le capital social de la société "Elefthérios Venizélos".
"La Grèce progresse, aujourd'hui, avec vision et plan pour demain", a poursuivi M. Caramanlis, rappelant la mise en préparation des prochaines grandes réformes institutionnelles qui concerneront la Constitution, les collectivités locales, la sécurité sociale, toute chose demandant un consensus social sur ce nouveau train de mesures que mettra en application le prochain gouvernement, et relevant aussi que "tous ces changements favorisent l'incitation à de nouveaux investissements, la création de nouvelles sociétés, de nouveaux emplois".
Au chapitre des privatisations, le chef du gouvernement, faisant valoir la "confiance des investisseurs étrangers" (Emporiki Bank), a confirmé ce qui avait été annoncé dans la semaine à propos de la recherche auprès des grands opérateurs d'un partenaire stratégique pour le management de l'Office hellénique des Télécoms (OTE), enchaînant ensuite sur les grands projets que sont la nouvelle politique énergétique, la stratégie touristique, une meilleure santé au service des citoyens, les nouvelles technologies, sur fond de mesures prises pour la transparence dans les projets d'appels d'offres et autres multiples contrôles de l'administration publique en matière de sources de revenus, concentration de services, réformes juridiques sur la succession, les abus de propriété notamment.
Reconnaissant un problème "hérité là aussi du passé" que sont les prix chers, et affirmant que la politique du gouvernement est de lutter pour un antagonisme sain "en alliance avec les consommateurs", M. Caramanlis a rappelé ce qui avait déjà été promis, à savoir l'octroi de 80% du 4e CCA à la province pour plus d'équilibre économique et social, affirmant que "notre objectif est que la Grèce cesse d'être la lanterne rouge de l'UE pour se placer parmi les premiers de ses partenaires". "Nous avons les politiques pour atteindre ce but", a-t-il expliqué, "et une stratégie. Cette stratégie des changements et des réformes, nous la poursuivrons sans hésiter avec le soutien de la société. Nous partageons avec tous le rêve d'une Grèce productive, concurrentielle, équitable socialement, une nation ayant confiance en elle-même et optimiste".
M. Caramanlis a par ailleurs exclu l'éventualité d'élections anticipées, dans une conférence de presse dimanche clôturant sa visite à la 71ème FIT, rappelant avoir évoqué dans son discours le jour précédent un agenda bien rempli pour les prochains mois, ce qui exclut cette éventualité.
Reconnaissant que le chômage reste à un niveau élevé (9,7% au cours du premier semestre), il a affirmé continuer "les efforts pour réduire le chômage qui ne peut être envisagé que dans le cadre d'une économie en expansion qui génère de nouveaux emplois et attire des investissements".
Enfin, abordant la question de l'orientation européenne de la Turquie, M. Caramanlis a affirmé qu'"Athènes attend avec grand intérêt le rapport de la Commission européenne sur la Turquie le mois prochain". "Nous soutenons, a-t-il dit, l'orientation européenne de la Turquie en estimant que dans cette voie, ce pays adoptera -progressivement sans doute- des règlements et des critères de conduite d'un Etat européen, d'une société européenne, dans l'intérêt de tous ses citoyens et de ses voisins".
Il a relevé cependant que dans cette voie, la Turquie a pris des engagements avec l'UE et que ceux-ci doivent être tenus ainsi que l'ont fait et que le font tous les pays candidats à l'adhésion.
Les centrales syndicales déçues par les déclarations du premier ministre
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Les syndicalistes, Yannis Panagopoulos (Confédération générale des Travailleurs de Grèce - GSEE), Ilias Vrettakos (Union des fonctionnaires - ADEDY) se sont dits "déçus" par les déclarations du premier ministre, M. Caramanlis, au cours du week end à Thessalonique, le premier donnant un "carton rouge" à la politique économique du gouvernement, et annonçant son opposition a priori au budget de l'Etat pour 2007.
"Les revenus des travailleurs, a souligné M. Panagopoulos, diminuent, alors que le déficit des caisses de sécurite sociale s'accroît, et sur les 250.000 contractuels seuls 34.000 ont été titularisés".
Pour leur part, si M. Vrettakos a dénoncé la dévalorisation des revenus des fonctionnaires, la précarité des contractuels enseignants en particulier et la non-reconnaissance toujours des hospitaliers et éboueurs en tant que travail insalubre, le vice-president de la GSEE, Alekos Kalyvis, a déclaré pour sa part "nous n'accepterons pas un consensus sur l'éducation et le système de la sécurité sociale tant que le gouvernement continuera à exercer une politique néolibérale et antipopulaire".
Des milliers de travailleurs -provenant de divers secteurs professionnels- ainsi que des retraités et des chômeurs ont répondu à l'appel lancé par la Confédération générale des Travailleurs de Grèce (GSEE) et du syndicat des fonctionnaires (ADEDY) pour manifester leur mécontentement samedi dans les rues de Thessalonique contre la politique économique du gouvernement.
Venus des quatre coins du pays, les manifestants se sont rassemblés samedi en début d'après-midi au centre de Thessalonique et leur marche pacifique a débuté peu après 19h30 en direction du Centre d'exposition "I. Vellidis" où se tient la FIT. Dans la soirée, les manifestants ont présenté une résolution concernant leurs revendications au secrétaire d'Etat à l'Emploi, Gérassimos Giakoumatos.
Par ailleurs, quelque 250 jeunes manifestants masqués ont provoqué des dégâts à l'extérieur des installations de la FIT. Les incidents ont débuté vers 20h30 lorsque les manifestants ont lancé des cockails molotov, des pierres et des pétards contre les forces de police qui ont répondu par des bombes lacrymogènes.
Après s'être réfugiés près du campus de l'Université de Thessalonique, les manifestants ont brûlé des voitures, provoqué des dégâts à deux succursales de la Banque nationale et de Emporiki Bank. Soixante-sept personnes ont été interpellées et conduites à la direction de la Sûreté de Thessalonique.
Papandreou voit "l’échec de la politique gouvernementale"
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Le président du PASOK (socialiste), Georgios Papandreou, a fait état d'"un échec de la politique gouvernementale et de la faiblesse du gouvernement à régler les problèmes de la société grecque", dans un discours prononcé dimanche à Preveza dans le cadre de sa rencontre avec les candidats du PASOK dans le département et les municipalités.
Réagissant au discours de M. Caramanlis à la FIT, le président du PASOK a souligné que face aux impasses de la politique gouvernementale, son parti propose une société d'égalité et de valeurs, tout en lançant une nouvelle attaque contre le gouvernement et M. Caramanlis en particulier et critiquant que "le gouvernement a prouvé qu'il ne peut rien offrir d'autre. Il a prouvé qu'il ne dispose d'aucune idée nouvelle pour mobiliser le peuple grec. Le gouvernement de la ND est incapable de faire face aux grands problèmes du pays".
Il a également dénoncé le fait que "M. Caramanlis reste invisible lorsque se présente les difficultés, alors qu'il se répand facilement en grandes paroles et maintenant, face aux impasses de sa propre politique, il accuse le peuple grec qui, avec raison proteste. C'est avec raison que le peuple grec déclare en avoir assez, car il voit ses revenus diminuer et fondre, il constate la cherté de tous les jours, il constate la corruption, le chômage et les impasses dans le secteur de l'éducation".
Le SG du CC du KKE (communiste), Aleka Papariga, a qualifié la politique de son parti face à la ND et au PASOK de "combattive", dans un discours prononcé à Larissa ou elle s'est rendue pour y rencontrer les candidats soutenus par le Parti communiste aux prochaines élections municipales et échanger des points de vue avec des jeunes en vue de l'organisation du 32e Festival de la Jeunesse communiste (KNE-ODIGITIS).
Commentant le discours de M. Caramanlis à la FIT, Mme Papariga a affirmé que "la ND est constante dans sa volonté de servir l'oligarchie de la richesse en répandant quelques miettes et des allègements fiscaux aux faibles revenus et retraités pour des raisons électorales et faire bonne mine", alors qu'elle a qualifié "le PASOK de dangereux, incapable et non crédible, car il n'est pas capable de s'opposer à la ND à partir du moment où les deux partis ont les mêmes positions sur des questions, telles que OTE et la Banque nationale de Grèce". Elle a encore affirmé qu'à partir des années '80 le PASOK a conduit à la passivité et au conservatisme les forces radicales du pays.
De son côté, le député de Synaspismos (gauche radicale), Yannis Dragassakis, a souligné que "le nouveau modèle de croissance" évoqué par le premier ministre à la FIT a conduit à l'élargissement des problèmes sociaux actuels et aux grandes inégalités sociales et régionales.
"Le seul engagement clair du premier ministre consiste en la poursuite des réformes exigées par l'environnement international, c'est-à-dire les marchés internationaux", mentionne encore M. Dragassakis en concluant que "cette insistance en la poursuite de cette politique va de pair avec un chômage de masse, des marchés et des prix incontrôlés, ainsi qu'une plus grande dépendance envers les capitaux spéculatifs internationaux et leurs exigences".
i-GR/ANA-MPA