L'écrivain et essayiste Jacques Lacarrière est mort samedi dernier à quelques mois de son anniversaire de 80 ans (le 2 décembre). Le Président de Grèce, Carolos Papoulias, et le Premier ministre et ministre de la Culture, Costas Caramanlis, lui ont rendu hommage dimanche en soulignant le premier que l'écrivain français était un "ardent défenseur de l'unicité de la Grèce antique et moderne" tandis que pour le second "la Grèce dit adieu à un vrai ami, un ambassadeur infatigable de notre culture dans le monde entier".
"Dans chaque manifestation de sa vie, Jacques Lacarrière a incarné l'esprit grec diachronique: l'esprit de mesure et d'harmonie, de lumière et d'humanisme", a affirmé M. Caramanlis dans sa déclaration écrite, mentionnant que "cet amant passionné de l'hellénisme" a invité à travers toute son oeuvre "ses lecteurs dans le monde entier à connaître et aimer la Grèce, antique et moderne".
Le président de la République, Carolos Papoulias, dans son message de condoléances, a retenu que l'écrivain français avait été un ardent défenseur de la Grèce, refusant absolument d'accepter l'idée d'une Grèce antique aux côtés d'une Grèce moderne, d'une langue ancienne et d'une langue moderne, insistant sur l'unicité de la Grèce.
"Jacques Lacarrière était un intellectuel et écrivain dont l'oeuvre a été reconnue internationalement. Helléniste et admirateur de la Grèce, Lacarrière a longtemps vécu en Grèce ayant avec un ouvrage tel que "L'été grec" dépeint avec brio une mosaïque de la vie en Grèce", a souligné aussi M. Papoulias.
"C'était un être merveilleux, un grand poète et un grand écrivain", a déclaré Nicole Lattès, directrice des éditions Robert Laffont à Paris.
Jacques Lacarrière a succombé des complications d'une opération du genou. Poète et voyageur, son nom a été associé à la Grèce depuis le succès de "L'été grec" (1976) auprès du grand public. Un succès formant publicité pour la Grèce qui aurait été dûment monnayé auprès de Melina Mercouri, alors ministre grec de la Culture, mais publicité pas si inattendue que cela, puisque commanditée, selon certaines sources, quelques années auparavant par les colonels qui s'étaient emparés du pouvoir en Grèce.
Mais, la Grèce, Lacarrière, il l'a fréquentait assidûment depuis son premier voyage en 1947. Il la parcourt à pied et, dans ses villes ou dans ses campagnes, il croit y voir une continuité avec l'âme grecque de l'antiquité. L'été grec avait été précédé de "Chemin faisant" en 1974, récit de 1000 km à pieds à travers la France. Pas de Grèce ancienne de la Sorbonne où il étudie le hindi dans les Langues O, pas de Grèce moderne non plus, mais la Grèce-Une, celle de 4.000 ans d'histoire, celle qui va de Sophocle à Seféris. D'ailleurs, Lacarrière traduit tantôt l'un tantôt l'autre, passant du théâtre et de l'érudition savante aux chants des rebètes et la musique des bas-fonds de réfugiés d'Asie mineure. Ecrivain voyageur, Lacarrière se fait naturellement réporter pour Le Monde, Nouvel Obs ou Géo.
En tout, Jacques Lacarrière aura publié, outre "L'été grec" et des nombreuses traductions dont Séféris, Ritsos, Vassilikos, une quarantaine d'ouvrages, parmi lesquels "Sophocle, essai de dramaturgie" (1960), "Les Hommes ivres de Dieu" (1961), "Chemin faisant, ou la Mémoire des routes" (1974), "Marie d'Egypte" (1983), "Ce bel et nouvel aujourd'hui" (1998), "L'envol d'Icare" (1993). Le dernier en date fut "Le Dictionnaire amoureux de la Grèce" (2001). Les éditions Robert Laffont publieront en octobre son dernier ouvrage "Dans la forêt des songes".
L'Académie française lui a décerné le Grand Prix pour l'ensemble de son œuvre en 1991. En 1995, il reçoit le Prix littéraire "Prince Pierre de Monaco".
Jacques Lacarrière est né le 2 décembre 1925 à Limoges. Il était marié à la comédienne d'origine égyptienne Sylvia Lipa. Dans ses dernières volontés l'écrivain a souhaité être incinéré, et que ses cendres soient dispersées en Grèce.