Dominique Moïsi (Conseiller spécial à l'Ifri et professeur au King's College de Londres)
Quels enseignements tirer de cette crise pour l'Europe ?
On a évité le pire. Le pire aurait été une division entre Paris et Berlin sur cette question essentielle. On a montré à nouveau que la clef de l'Europe, c'est l'accord entre la France et l'Allemagne. Quand ces deux capitales se mettent d'accord, elles imposent leur volonté aux autres et quand elles ne le sont pas, rien ne se passe. Un bilan classique donc, sauf que cela risque de laisser plus de traces auprès des autres pays européens, qui se sont sentis un peu marginalisés pour les Italiens, méprisés pour les Finlandais? On a évité le pire, mais n'est-ce pas là une victoire à la Pyrrhus ?
De quelle façon ?
Est-ce que l'on ne va pas sentir le coût de tout cela dans les mois, les années qui viennent par la montée d'un sentiment populiste anti-élites, anti-Bruxelles au nom de principes démocratiques ? Ces semaines d'hésitations ont été coûteuses pour l'image de l'Europe. Moyennant quoi, on ne serait pas arrivé à cet accord, la situation serait infiniment pire. On n'a pas sauvé l'image de l'Europe auprès...