[i] L'attaque dura longtemps … , jusqu'à ce que Notre Seigneur fasse lever, en faveur des Croisés, le vent appelé Borée [vent du nord], qui jeta les nefs et les navires contre la rive plus qu'auparavant. Deux nefs qui étaient liées entre elles, dont l'une s'appelait « la Pèlerine » et l'autre « le Paradis », s'approchèrent de la tour, l'une d'un côté et l'autre de l'autre, selon que Dieu et le vent les menèrent, si bien que l'échelle de « la Pèlerine » se joignit à la tour. Aussitôt, un Vénitien et un chevalier de France, qui s'appelait André Durboise, entrèrent dans la tour, et d'autres gens commencèrent à entrer après eux. Ceux de la tour, mis en déroute, s'en allèrent.
Quand les chevaliers qui étaient dans les huissiers [grands vaisseaux de transport ayant une porte à sa poupe] virent cela, ils descendirent à terre et dressèrent des échelles contre le plat du mur, et montèrent de force à son sommet. Ils conquirent à peu près quatre tours. Ils commencèrent à sauter hors des nefs et des huissiers et des galées [petits bateaux de guerre] à qui mieux mieux, à qui serait le premier. Ils brisèrent environ trois portes et entrèrent à l'intérieur. Ils commencèrent à faire sortir les chevaux des huissiers. Les chevaliers se mirent à chevaucher et se dirigèrent droit vers le camp de l'empereur Murzuphle (Alexis V Doucas, mourtzouphlos, « aux épais sourcils »). Celui-ci avait rangé ses corps de bataille devant ses tentes. Quand ils virent venir les chevaliers à cheval, ils furent mis en déroute et l'empereur s'en alla, fuyant à travers les rues jusqu'au château de Bouche-de-Lion.
Alors vous auriez pu voir abattre des Grecs, et conquérir chevaux et palefrois, mules et mulets, et bien d'autre butin. Il y eut là tant de morts et de blessés qu'on n'en pouvait trouver ni fin ni mesure. Une grande partie des nobles de Grèce s'enfuirent vers la porte de Blacherne [une des 24 portes dans le mur de Théodôse II, au nord, entre le monastère de Chora, la porte d'Andrinople et la Corne d'or avec la basilique Marie Théotokos-Mère de Dieu].
Il était déjà tard, et ceux de l'armée des Croisés étaient las de la bataille et du massacre. Ils commencèrent à s'assembler sur une grande place qui était à l'intérieur de Constantinople. Ils décidèrent de camper près des murs et des tours qu'ils avaient conquises: car ils ne croyaient pas pouvoir vaincre la ville, fût-ce en un mois, avec ses églises et ses palais fortifiés, et le peuple qui était dedans. Ainsi comme ils l'eurent décidé, ainsi le firent-ils. [/i]
12 avril 1204. Assaut de Constantinople (transcrit de Geoffroy Ville-Hardouin, 1155-1213). La IVème croisade ne combattit que des Chrétiens ...
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