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Antithèse

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Submitted by Eto D. on

Bon, puisqu'il semble qu'un seul point de vue soit de mise sur ce forum (celui des pauvres Chypriotes Grecs - Cf les commentaires de Panos entre autres - face aux grands méchands Chypriotes Turcs - et au passage de l'ensemble de la Turquie) , ma curiosité maladive m'a poussé à me renseigner sur l'histoire et sur le comment du pourquoi (de plus, je n'aime pas me faire une opinion sur les avis d'un seul côté, c'est comme si je jugeais en ayant écouté que l'accusation sans avoir écouté la défense !). La plupart des contestations que je lis sur ce site ne sont jointes d'aucune source fiable ou alors, elles dates... J'ai par exemple cherché sur le net des traces concernant le financement Européen de l'Armée Turc, et à part celui prévu dans le cadre de l'Otan (La Turquie fait partie de l'Otan soit dit en passant !), j'avoue ne pas avoir trouvé quelque chose de concluant, et même si c'était le cas, je remarque que dans la pratique, le rapprochement des Grecs et des Turcs ont cet étrange effet visible pour les futurs appelés Grecs de voir leur Service militaire réduit de quelques mois (je crois me souvenir que j'aurai préféré profiter pleinement de ma jeunesse au lieu d'offrir quelques mois de ma vie à l'Armée française)...

Bref, ce n'est pas le sujet là... J'ai dans mes recherches (principalement motivées par les différents sujets lancé sur ce forum afin de parfaire ma connaissance sur les points "chauds" concernant les situations de Chypre et entre la Turquie et la Grèce, après tout, ayant des origines grecque, je suis un petit peu concerné), trouvé un article sur le site du "Monde Diplomatique", qui fait un bilan sur le "Non" des Chypriotes Grecs, et j'avoue que je suis resté assez dubitatif sur le sujet.

Donc, je me permet de faire un copier-coller ce cet article que je trouve incroyable et malheureusement d'une grande tristesse de voir que les responsables de la non-évolution d'une situation chaotique ne sont pas ceux que je croyais...

"Occasion perdue pour les Chypriotes

Comme le président Tassos Papadopoulos les y avait appelés à grand renfort de démagogie, les Chypriotes grecs ont rejeté à 76 %, le 24 avril, le plan de réunification proposé par les Nations unies, approuvé au contraire par 65 % des Chypriotes turcs. Cette affirmation de chauvinisme grec maintient la division de l’île, que l’entrée dans l’Union européenne offrait l’occasion d’unifier, alors même que la majorité des habitants du Nord s’émancipe du nationalisme turc.

Au soir de ce 7 avril, la voix du président chypriote grec se brise : « Mon peuple chypriote grec, je te prie de refuser le plan Annan. Je te prie de dire fortement “non” le 24 avril. Je te prie de défendre ton droit, ta dignité et ton histoire. » Seul un « non » – un « ochi » – pourrait empêcher la dissolution de la République. M. Tassos Papadopoulos ôte alors ses lunettes afin qu’on voie ses larmes, et lance : « Joyeuses Pâques ! »

Ce mélodrame entendait faire croire aux Chypriotes grecs que le plan des Nations unies représentait un piège mortel : cinquante-cinq minutes pour ses défauts, cinq secondes pour ses avantages. Après quoi la télévision d’Etat RYK partagea son écran en deux : d’un côté la foule nationaliste fêtant son héros devant le palais présidentiel, de l’autre les représentants des partis pesant le pour et le contre. Appelés à voter, près de 90 % des téléspectateurs répondirent « ochi » (1). En fin de campagne, la chaîne publique ira plus loin : elle interdira d’antenne le commissaire européen à l’élargissement Günter Verheugen et le repésentant des Nations unies Alvaro de Soto...

Les artifices de la communication (2) ne suffisent cependant pas à expliquer que la grande majorité des Chypriotes grecs ait rejeté le plan Annan le 24 avril. Certes, M. Papadopoulos et ses conseillers ont eu recours aux symboles de la lutte contre la puissance coloniale britannique dans les années 1950, puis contre l’invasion turque de 1974. Mais le refus était profondément enraciné dans les esprits, et ce pour trois raisons : un besoin de sécurité, la peur de tout risque politique et l’image de Chypriotes turcs concurrents et non partenaires du bien commun d’une île réunifiée.

D’où leur incapacité à mesurer les atouts d’un plan onusien qui, pourtant, ne fait que des vainqueurs. Aux Chypriotes turcs, il offre un Etat reconnu au sein d’une fédération, hors de la tutelle d’Ankara, ainsi qu’une perspective européenne de développement économique. Aux Chypriotes grecs, il assure la restitution d’un territoire où, théoriquement, les deux tiers des réfugiés de 1974 pourront retourner – et la possibilité, soit de récupérer un tiers des propriétés perdues et de les exploiter, soit d’être indemnisés.

Ensuite, toujours grâce à l’adhésion, la future République unie supprimera progressivement les dérogations temporaires à l’acquis communautaire. Loin d’officialiser une dérive permanente dans ce domaine, les représentants de Bruxelles ont veillé, lors des négociations, à ce que l’Union continue – tant que la Turquie voudra y adhérer – à peser en faveur d’une évolution de l’île harmonieuse et conforme aux acquis.

Quarante ans de conspiration
De ce rôle de l’Union dans les négociations, M. Papadopoulos n’a rien dit, fidèle à son engagement, non d’Européen mais de nationaliste grec enfermé dans le passé. Et pour cause : c’est le dernier homme politique encore actif de la génération qui a organisé la guérilla des années 1950 contre les Britanniques. Et l’Organisation nationale des combattants chypriotes (EOKA) se fixait pour but, non l’indépendance de l’île, mais son union (enosis) avec la Grèce. Après l’indépendance, en 1963, elle se lança dans une guerre civile meurtrière. M. Papadopoulos joua même un rôle décisif dans le plan secret Akritas, mettant sur pied des importations d’armes avec le chef des services secrets grecs Giorgos Papadoulos – l’organisateur, le 21 avril 1967, du putsch d’Athènes.

Traîtres à la République de Chypre, ces conspirateurs avaient leur pendant chez les Chypriotes turcs. Sous la direction de M. Rauf Denktash et de ses commanditaires à Ankara, ceux-ci aspiraient à la division (taksim) de l’île, exclue, comme l’enosis, par la Constitution de 1960. Pour eux, la guerre civile vint donc, en 1963, à point nommé. Les attaques grecques contre des quartiers turcs leur permirent de transférer les Turcs du Sud de l’île vers le Nord : au printemps 1964, 60 % des Chypriotes turcs vivent dans des enclaves contrôlées par des officiers turcs.

La séparation s’accomplit pendant l’été 1974, lorsqu’Ankara profita du putsch de la junte d’Athènes contre le gouvernement Makarios pour envahir le nord de l’île. Les Chypriotes grecs du Nord s’enfuirent dans le Sud, et le reste des Chypriotes turcs du Sud se retrouvèrent au Nord. Entamé en 1963-1964, ce « remaniement ethnique » eut pour organisateurs ces mêmes hommes politiques qui, quarante ans après, dirigent, des deux côtés, le camp du « non ».

Leurs arguments se ressemblent bizarrement. Tandis que M. Denktash dénonce le modèle fédéral comme une menace d’« extermination » des Chypriotes turcs, M. Papadopoulos y voit la fin de la République de Chypre à dominante grecque. Voilà plus de vingt ans que, à chaque espoir de solution politique, ils rabâchent la même chose.

Son pouvoir actuel, le président chypriote grec le doit à la coalition la plus étrange de l’histoire. En février 2003, le président du Diko, troisième force politique du pays avec 15 % des voix, parvient au pouvoir grâce à l’ex-Parti communiste (Akel). Premier parti avec 35 % des suffrages, celui-ci offre à M. Papadopoulos une majorité face à son prédécesseur, le conservateur libéral Glafkos Klerides. Mais les dirigeants communistes avaient promis à leurs militants que le nouveau président s’attacherait à faire entrer Chypre réunifiée dans l’Union européenne.

Cette chance a pris corps avec le plan de l’ONU, présenté en novembre 2002 par M. Kofi Annan dans un contexte triplement favorable :

– à Bruxelles, un consensus s’est dégagé pour faire de la solution du problème chypriote la condition de l’adhésion de la Turquie, adhésion encouragée par Washington, à la recherche d’un modèle de compatibilité entre culture marquée par l’islam et principes démocratiques ;

– en Turquie, le Parti pour la justice et le développement (AKP) de l’islamiste modéré Recep Tayyip Erdogan, qui a remporté les élections du 3 novembre 2002, s’attaque, sur la question chypriote, au blocage de l’armée turque et de l’establishment kémaliste ;

– à Chypre-Nord, le président Denktash perd le soutien de la population, qui mise sur l’adhésion à l’Union pour sortir de l’isolement et de la misère.

Ce dernier facteur a pris corps lors des élections de décembre 2003, avec la victoire des partis d’opposition, qui ne disposent cependant pas d’une majorité stable au Parlement. Chef du premier parti d’opposition et nouveau premier ministre, M. Mehmet Ali Talat a dû former une coalition avec le parti de M. Serdar Denktash, le fils du président. Ankara peut néanmoins contribuer à neutraliser le clan Denktash.

Or M. Erdogan l’explique sans détour : l’attitude obstinée de l’armée, des kémalistes et du Parti républicain du peuple (CHP, opposition) bloque toute perspective européenne pour la Turquie. C’est en décembre 2004 que doit être prise la décision d’entamer – ou non – les négociations d’adhésion. Le 26 janvier 2004, le gouvernement de l’AKP a donc demandé la reprise des négociations sur le plan de l’ONU, bloquées par M. Denktash. Au cas où les Chypriotes se montreraient incapables de trouver un compromis, le chef du gouvernement turc suggérait à M. Annan de trancher les désaccords et de soumettre son plan à référendum au Nord comme au Sud.

Ce tournant met M. Papadopoulos autant que M. Denktash échec et mat. Tant que le président chypriote turc faisait s’enliser toute négociation, son homologue grec pouvait accepter le plan en tant que « base de négociations ». Mais la relance du dialogue, à New York, l’a placé au pied du mur. Fini, le temps du bluff. Bien sûr, « Mister No et Mister Never » – comme les a baptisés l’opposant chypriote turc Mustafa Akinici – se sont cramponnés à des questions de forme pour éviter de négocier le fond. Pour les y contraindre, il a fallu tout le poids de la Grèce et de la Turquie, elles-mêmes sous pression européenne et américaine, et les modalités fixées par l’ONU : en cas d’échec, M. Annan proposerait directement un ultime plan aux électeurs chypriotes, le 24 avril.

A cette décision, M. Papadopoulos ne pouvait s’opposer, sauf à défier l’ONU, mais aussi l’Union européenne, désireuse d’accueillir Chypre réunifiée le 1er mai. D’autant qu’à Athènes, le gouvernement conservateur de M. Kostas Karamanlis, issu des élections du 7 mars, poussait lui aussi au compromis.

Après des semaines de sur-place à Nicosie, les négociations se transportent à Bürgenstock, près de Lucerne (Suisse). Malgré l’absence de M. Denktash, qui ne veut pas signer une « capitulation », et son remplacement par le premier ministre chypriote turc Mehmet Ali Talat, prêt – comme la délégation d’Ankara – à signer le dernier plan Annan, rien ne bouge : M. Papadopoulos montre son vrai visage (3). Avec son obstruction systématique, il se met à dos non seulement les représentants des Nations unies et le commissaire européen chargé de l’élargissement, M. Günter Verheugen, mais aussi la délégation d’Athènes. En revanche, M. Karamanlis ne veut pas rendre publics ses différends avec le président de Chypre.

Lorsque M. Annan propose son propre plan (dit Annan V), avec l’accord des Chypriotes turcs et des Turcs, M. Papadopoulos fait dire par un porte-parole qu’il s’agit d’une catastrophe : il satisferait presque toutes les demandes turques, mais très peu des demandes grecques. Cette propagande masque aux Chypriotes grecs les améliorations non négligeables qu’ils ont obtenues grâce à la pression de Bruxelles.

Cette première impression négative restera dominante. Elle aurait pu être corrigée si les partisans d’Annan V étaient passés à l’offensive. Mais l’Akel et le parti d’opposition Disy, dont les directions penchaient plutôt vers le « oui », ont reporté leur décision à des congrès organisés peu avant le référendum. C’est à un peuple abreuvé des seuls arguments du « non » que M. Papadopoulos s’est adressé. A quoi s’est ajouté le message de Pâques du synode orthodoxe, mettant en garde les fidèles contre le « chemin de Golgotha » et l’« humiliation (4) ».

Ainsi s’est créé un climat quasiment irréversible en faveur du « non ». Ayant pris conscience qu’un tiers de ses électeurs avait basculé (5), la majorité du comité central de l’Akel renoncera à soutenir le plan Annan. Le chef du parti, M. Dimitris Christofias, demandera le report du référendum et, finalement, deux jours avant le scrutin, appellera à voter non. Autrement dit, pour parer au danger d’un schisme du parti, l’ex-PC a déserté la lutte contre la division du pays.

Tout ou rien, rien du tout
En tant que parti des travailleurs, l’Akel a toujours prôné, contre le nationalisme, l’entente des Chypriotes grecs et turcs. Son soutien à M. Papadopoulos a donc consterné, au Nord, ses partenaires du Parti républicain turc (CTP). Le référendum sur le plan Annan V était sa dernière chance. Mais sa direction n’a pas osé défendre le « oui » – son journal Haravghi a même commenté négativement le plan de l’ONU. Faute de courage et de temps, l’Akel a abandonné l’initiative au président Papadopoulos…

Trois arguments auraient cependant suffi à démontrer à la population les enjeux de son vote :

– aucune solution ne peut satisfaire tout le monde, et notamment tous les réfugiés. S’il ne peut réparer une injustice historique, le plan Annan crée de meilleures conditions pour l’avenir. Et il n’y en aura pas de meilleur avant longtemps ;

– le plan onusien, de surcroît, est très flexible. Même les restrictions au retour des réfugiés (des deux côtés) peuvent être adoucies ou abolies si une majorité le décide au Nord comme au Sud. L’avenir dépend de la volonté des uns et des autres de vivre ensemble et en paix ;

– il faudrait enfin demander aux partisans du « non » comment, concrètement, ils atteindront les objectifs que le plan Annan n’a pas remplis. Ils se plaignent que tous les réfugiés ne puissent retourner dans leurs anciens villages, mais empêchent, avec leur « non », le retour de 100 000 d’entre eux. Ils pestent contre la présence prévue de 950 soldats turcs, mais permettent à 35 000 de rester sur le territoire de Chypre. Ils critiquent la décision de naturaliser 41 000 colons turcs dans le Nord, mais causeront l’émigration d’encore plus de Chypriotes turcs, laissant ainsi la place à de nouveaux colons (6). Les partisans du tout ou rien sont ceux du rien du tout...

Nul ne sait comment les choses vont évoluer. Les Européens devront s’habituer à ce « monde pervers » où les Chypriotes turcs parviennent à chasser le vieux Denktash, tandis le vieux Papadopoulos réussit à mobiliser les Chypriotes grecs. En disant « non » au plan Annan, Les Chypriotes grecs ont renoncé à cette solidarité si souvent – et gratuitement – proclamée avec leur compatriotes turcs. En revanche, au Nord, ils n’ont pas seulement voté majoritairement pour un avenir dont leurs compatriotes du Sud les ont privés : ils ont pris des risques lorsqu’ils sont allés manifester contre M. Denktash et pour l’Europe, surveillés et harcelés par les services secrets turcs, toujours contrôlés par l’armée. Ces véritables Européens de Chypre ne méritaient pas d’être punis.

Niels Kadritzke"

http://www.monde-diplomatique.fr/2004/0…

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Eto D.

In reply to by panos

Ne connaissant pas cette situation, je ne peux qu'essayer d'imaginer la façon dont je réagirai si j'étais directement concerné par ce vol de territoire. Il est plus que probable que ma colère se rapprocherait de celle de certains d'entre vous. Ce que j'apprécie dans une discussion, c'est justement l'échange d'idées qui me permet de tenter de mettre à la place, ou au pire d'essayer de comprendre, un point de vue qui différe du mien (ce qui ne veut pas dire que j'ai raison). Cependant, vous avourez que de lire toujours des commentaires dans le même sens (critique de chaque fait et geste de la Turquie), peuvent à force, jouer contre vous en vous faisant jouer, sans doute à tort, le rôle de celui qui refuse toute discussion.

Quoi qu'il en soit, merci pour toutes vos réponses.

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Fri, 10/07/2005 - 10:28 Permalink