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Lamartine, La mort de Socrate, suite (4)

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Προτάθηκε από Efthymiou Thomas την

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« - Mais mourir c est souffrir; et souffrir est un mal.
—Amis, qu'en savons-nous? Et quand l'instant fatal,
Consacré par le sang comme un grand sacrifice,
Pour ce corps immolé serait un court supplice,
N'est-ce pas par un mal que tout bien est produit ?
L'été sort de l'hiver, le jour sort de la nuit,
Dieu lui-même a noué cette éternelle chaîne;
Nous fûmes à la vie enfantés avec peine,
Et cet heureux trépas, des faibles redouté,
N'est qu'un enfantement à l'immortalité !

" Cependant de la Mort qui peut sonder l'abîme ?
Les dieux ont mis leur doigt sur sa lèvre sublime :
Qui sait si dans ses mains, prêtes à la saisir,
L'âme incertaine tombe avec peine ou plaisir ?
Pour moi, qui vis encor, je ne sais, mais je pense
Qu'il est quelque mystère au fond de ce silence ;
Que des dieux indulgents la sévère bonté
A jusque dans la mort caché la volupté,
Comme, en blessant nos coeurs de ses divines arme ?,
L'Amour cache souvent un plaisir sous des larmes ! »

L'incrédule Cébès à ce discours sourit.
« Je le saurai bientôt, » dit Socrate. Il reprit :

« Oui : le premier salut de l'homme à la lumière,
Quand le rayon doré vient baiser sa paupière,
L'accent de ce qu'on aime à la lyre mêlé,
Le parfum fugitif de la coupe exhalé,
La saveur du baiser, quand de sa lèvre errante
L'amant cherche, la nuit, les lèvres de l'amante,
Sont moins doux à nos sens que le premier transport
De l'homme vertueux affranchi par la mort !
Et pendant qu'ici-bas sa cendre est recueillie,
Emporté par sa course, en fuyant il oublie
De dire même au monde un éternel adieu !
Ce monde évanoui disparaît devant Dieu !

« - Mais quoi! suffit-il donc de mourir pour revivre ?
— Non; il faut que des sens notre âme se délivre,
De ses penchants mortels triomphe avec effort ;
Que notre vie enfin soit une longue mort !
La vie est un combat, la mort est la victoire,
Et la terre est pour nous l'autel expiatoire
Où l'homme, de ses sens sur le seuil dépouillé,
Doit jeter dans les feux son vêtement souillé,
Avant d'aller offrir sur un autel propice
De sa vie, au Dieu pur, l'aussi pur sacrifice !

" Ils iront, d'un seul trait, du tombeau dans les cieux,
Joindre, où la mort n'est plus, les héros et les dieux,
Ceux qui, vainqueurs des sens pendant leur courte vie,
Ont soumis à l'esprit la matière asservie,
Ont marché sous le joug des rites et des lois,
Du juge intérieur interrogé la voix,
Suivi les droits sentiers écartés de la foule,
Prié, servi les dieux, d'où la vertu découle,
Souffert pour la justice, aimé la vérité,
Et des enfants du ciel conquis la liberté !

«Mais ceux qui, chérissant la chair autant que l'âme ?
De l'esprit et des sens ont resserré la trame,
Et prostitué l'âme aux vils baisers du corps,
Comme Léda livrée à de honteux transports,
Ceux-là, si toutefois un dieu ne les délivre,
Même après leur trépas ne cessent pas de vivre,
Et des coupables noeuds qu'eux-même ils ont serrés
Ces mânes imparfaits ne sont pas délivrés !
Comme à ses fils impurs Arachné suspendue,
Leur âme, avec leur corps mêlée et confondue,
Cherche enfin à briser ses liens flétrissants;
L'amour qu'elle eut pour eux vit encor dans ses sens;
De leurs bras décharnés ils la pressent encore,
Lui rappellent cent fois cet hymen qu'elle abhorre,
Et, comme un air pesant qui dort sur les marais,
Leur vil poids, loin des dieux, la retient à jamais!
Ces mânes gémissants, errant dans les ténèbres.
Avec l'oiseau de nuit jettent des cris funèbres;
Autour des monuments, des urnes, des tombeaux,
De leur corps importun traînant d'affreux lambeaux,
Honteux de vivre encore, et fuyant la lumière,
A l'heure où l'innocence a fermé sa paupière,
De leurs antres obscurs ils s'échappent sans bruit,
Comme des criminels s'emparent de la nuit,
Imitent sur les flots le réveil de l'aurore,
Font courir sur les monts le pâle météore;
De songes effrayants assiégeant nos esprits,
Au fond des bois sacrés poussent d'horribles cris,
Ou, tristement assis sur le bord d'une tombe,
Et dans leurs doigts sanglants cachant leur front qui tombe.
Jaloux de leur victime, ils pleurent leurs forfaits :
Mais les âmes des bons ne reviennent jamais ! »

Il se tut, et Cébès rompit seul le silence :
« Me préservent les dieux d'offenser l'Espérance,
Cette divinité qui, semblable à l'Amour,
Un bandeau sur les yeux, nous conduit au vrai jour!
Mais puisque de ces bords comme elle tu t'envoles,
Hélas ! et que voilà tes suprêmes paroles,
Pour m'instruire, ô mon maitre, et non pour t'affliger,
Permets-moi de répondre et de t'interroger. »
Socrate, avec douceur, inclina son visage,
Et Cébès en ces mots interrogea le sage :
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