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Basterot, 30 septembre, fin de transcription à Alexandrette.

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Submitted by Thomas Efthymiou  on

[i]30 SEPTEMBRE. Nous débarquons de bon matin et traversons la ville d'Alexandrette [aujourd’hui Iskenderun] sauf cinq ou six maisons de négociants près de la plage, ce sont des huttes de branchage et de boue, quelque chose comme le quartier indigène de Biskra ou de Tuggurt. Nous arrivons à la plaine marécageuse qui s'étend entre la ville et les montagnes. Le chemin d'Alep traverse cette solitude, parsemée de quelques touffes de roseaux. A 2 ou 300 mètres des dernières masures est un tumulus, reste informe de maçonnerie antique, un peu plus loin, une vaste enceinte fortifiée qui date, dit-on, du temps des croisés. Des chameaux lourdement chargés, des mulets avec leurs moukres, des hommes armés, à cheval, s'avancent en ligne à travers la plaine. Les hommes, grands et vigoureux, ont un air de fierté et d'indépendance; ils n'ont rien de la démarche maladroite et disgracieuse de nos paysans abâtardis par la conscription et la centralisation.
Sur les bords de cette plaine d'Iskanderoun on éprouve toutes les sensations qui donnent aux voyages un si puissant attrait. Ces chameliers qui passent devant nous ont peut- être vu le grand désert de Kobi, ces muletiers viennent peut-être de la Perse. Cette caravane ne se dirige-t-elle pas vers Bagdad et Bassora?
L'imagination suit les hardis pionniers qui ont osé pénétrer le secret de l'Asie centrale, Tavernier, Vanbery qui, déguisé en derviche, visita Khiva et Boukkara, ces terres du Chorasme et de la Sogdiane, peut être moins connues maintenant qu'aux jours de Cyrus et d'Alexandre.
Nos forces nous font défaut, et nous ne verrons jamais ces pays mystérieux dont nous touchons aujourd'hui le seuil. Tous les conquérants de l'Asie sont passés par ces rivages. Alexandrette doit son nom à Alexandre le Grand. A peu de distance, au nord, est Issus, où le jeune roi macédonien remporta sa première grande victoire sur Darius. Les détails donnés par les historiens de l'antiquité sur cette journée fameuse sont très-obscurs, parce que la précision, l'exactitude topographique sont en somme ce qu'ils cherchent le moins. Alexandre avait fait des marches et des contre-marches en Cilicie [ensuite Petite Arménie], il avait été à Tarsous, puis à Anchiale, ville déchue, où (je cite Arrien):

On voyait encore le tombeau de Sardanapale sur lequel est élevée sa statue qui semble applaudir des mains on y remarque une inscription en caractères assyriens et qu'on assure être en vers, dont voici le sens « Sardanapale fils d’Anakinadasarès a fondé Anchialon et Tarse en un jour; passants, mandez, buvez, jouissez le reste n'est que vanité. « - C'est ce que semble indiquer la manière dont il claque les mains l'expression jouissez a dans l'assyrien un caractère plus voluptueux encore.- »

Ce serait chose bien curieuse si, quelque jour, on découvrait cette inscription. L'étude des caractères cunéiformes, qui a pris un tel développement depuis les découvertes de Botta et de Layard à Nemroudet Koyoundjik, fait croire au savant M. Oppert, que les Grecs avaient fort mal déchiffré cette inscription, et que les mots où ils avaient cru voir le nom du père de Sardanapale, sont les expressions de Anakou nadou sar Assour (moi le grand roi d'Assyrie), qui reviennent souvent dans les textes cunéiformes. Pendant qu'Alexandre parcourait donc lentement la Cilicie, Darius de son côté ne pressait point sa marche. Loin de prendre le chemin le plus direct de la Babylonie, suivi par les dix mille en allant vers Cunaxa, il passait par Damas où il laissait ses bagages les plus pesants et une partie de son harem. Ce qu'on peut comprendre de ses plans montre l’indécision et les caprices de ces enfants gâtés, les rois absolus. Sa déroute fut complète, il n'eut que le temps de fuir. Il avait bravement combattu, cependant, au commencement de la journée, et il avait même blessé légèrement à la cuisse son rival selon quelques auteurs. Il faut lire dans le Plutarque traduit par Amyot la description de la gaieté et de la bonne grâce d'Alexandre, de son humanité et de sa courtoisie pour les princesses captives. Après la bataille, couvert de sueur et de sang, il entra dans le quartier de Darius avec sa jeune garde d'hétaires, se baigna dans la riche tente disposée en salle de bains, et s'étant fait servir le souper préparé pour le roi des Perses « il se tourna devers ses familiers et leur dit « c'estoit estre roy cecy, à vostre advis, n'estoit pas. »
A cette époque ce beau jeune prince est encore le plus sympathique de tous les conquérants, mais bientôt viendront les enivrements de la toute-puissance, les orgies, le meurtre de Clitus et les cruautés superstitieuses des funérailles d'Éphestion.
Si quelque chose à Alexandrette rappelle l'Europe, ce sont les poteaux du télégraphe, signe de cette civilisation moderne qui tend à conquérir jusqu'à l'immuable et insaisissable Asie.
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